Berlin, 1995. Au moment où les ruines du Mur fument encore dans les mémoires, un drôle de projet naît : In Extremo, “À l’extrême”. Un groupe pas comme les autres : sept musiciens aux surnoms moyenâgeux, des cornemuses construites maison, des chansons en latin, en vieux norrois, en français ou en allemand… et une envie furieuse de mêler le fracas du metal aux sonorités venues des marchés médiévaux.


Des débuts artisanaux

Michael Robert Rhein, alias Das letzte Einhorn1, fonde le groupe avec quelques amis musiciens issus de la scène punk et folk. À l’origine, In Extremo joue surtout sur les places et foires médiévales, en acoustique. Deux albums paraissent dans ce style (In Extremo Gold et Hameln, 1997-98).

Mais très vite, l’idée de brancher les cornemuses sur des amplis s’impose. En 1998 sort Weckt die Toten!, album fondateur du metal médiéval : riffs électriques, textes anciens, et un style inédit qui va faire école.

Ai Vis Lo Lop (J’ai vu le loup) est une chanson occitane médiévale (un sirventès du XIIIᵉ siècle, attribué à Guiraut Riquier ou à d’autres troubadours). Le texte raconte une rencontre allégorique entre un loup, un renard et un lièvre — une fable grinçante sur la nature humaine, le pouvoir et la ruse.

L’ascension

Dès la fin des années 1990, In Extremo trouve son public.

Les albums s’enchaînent : Verehrt und angespien (1999), Sünder ohne Zügel (2001), 7 (2003), Mein rasend Herz (2005).

Le groupe monte en puissance, attire MTV et VIVA2 avec des clips comme Küss mich ou Vollmond, tout en gardant son esthétique médiévale.

Avec Vollmond, In Extremo affirme qu’ils ne se limitent pas au folk médiéval électrifié mais qu’ils peuvent rivaliser avec des productions metal et goth grand public. Le morceau reste l’un de leurs plus connus, souvent joué en live, et il a contribué à les propulser vers les chaînes musicales comme MTV.
pour In Extremo, c’est un tournant : un tube qui les rend visibles à une génération entière, mais qui cristallise aussi les critiques de “commercialisation”. Certains fans y voient une trahison des racines folk/metal du groupe, et eux-mêmes ont déclaré ne pas vouloir la jouer dans certaines émissions comme Top of the Pops, ne se reconnaissant pas totalement dans cette image trop polie.

Sur scène, c’est un déluge de flammes et de pyrotechnie. In Extremo devient l’un des piliers de la scène allemande, au côté de Subway to Sally, Tanzwut et Corvus Corax.

Et c’est en Live qu’ils sont les meilleurs : pour qui n’a pas l’occasion de les voir en vrai (et il faut bien dire qu’en France, leurs passages restent plus rares qu’en Allemagne), ces lives sont le meilleur moyen de comprendre pourquoi le groupe est considéré comme un pilier. Ce n’est pas qu’une discographie studio : c’est une identité sonore et visuelle qui prend tout son sens sur scène.
A recommander

In Extremo en live

On peut écouter In Extremo en studio, mais c’est sur scène que le groupe se révèle vraiment. Feu, étincelles, cornemuses amplifiées, refrains repris par des foules entières : chaque concert est une messe médiévale sous stéroïdes.

Heureusement, plusieurs albums et DVD live permettent d’en avoir un aperçu : Live 2002, Raue Spree (2006), Am goldenen Rhein (2009), Sterneneisen Live (2012)… Autant de captations où l’on sent la ferveur du public et la puissance des shows.

In extremo Live 2002
In extremo Live

Pour celles et ceux qui n’ont pas croisé In Extremo sur un festival ou en tournée, ces lives restent la meilleure porte d’entrée.

Plus qu’une discographie, c’est une expérience.


Le sommet et les mutations

Avec Sängerkrieg (2008), le groupe atteint la première place des charts allemands. Un tournant : les morceaux deviennent plus rock, plus produits, parfois plus accessibles, au grand dam de certains fans historiques qui regrettaient le côté “brut de forge” des débuts.

Un hymne fédérateur, au refrain simple et efficace, taillé pour les festivals. C’est typiquement le genre de titre qui marque la bascule vers un son plus accessible, sans renoncer aux cornemuses.

Les albums suivants (Sterneneisen, 2011 ; Kunstraub, 2013) confirment cette orientation, mais sans perdre totalement la marque de fabrique : cornemuses hurlantes, refrains fédérateurs, énergie scénique.

morceau emblématique du In Extremo moderne, avec un refrain fédérateur et une énergie rock assumée. Son clip joue moins sur l’imagerie médiévale que sur la fraternité, la boxe et les virées entre amis, ancrant le groupe dans un esprit plus populaire et accessible.

Rebond et continuité

En 2016, Quid pro quo réaffirme le goût du mélange, convoquant des invités comme Hansi Kürsch (Blind Guardian). En 2020, malgré le COVID, le groupe sort Kompass zur Sonne et reprend la route dès que possible, avec un passage remarqué au Hellfest 2022. La disparition de Boris “Yellow” Pfeiffer (cornemuses, chalemies, flûtes) en 2022 est un coup dur, mais In Extremo poursuit l’aventure à six, sortant en 2024 l’album Wolkenschieber.


Entre Moyen Âge et modernité

Le style d’In Extremo a évolué : du folk médiéval pur à un rock/metal plus calibré, mais toujours nourri d’airs anciens. Cette dualité est leur force : ils incarnent autant la fête païenne que le concert de stade. Et si certains fans préfèrent les premiers albums rugueux, d’autres se laissent séduire par la puissance scénique qui reste intacte.


Rôlistiquement vôtre

Pour un meneur de jeu, In Extremo est une mine :

  • Ambiances médiévales-fantastiques : une taverne de D&D peut s’embraser sur Ai Vis Lo Lop.
  • Campagnes épiques : un siège de château ou une bataille de Warhammer prend une autre ampleur avec Spielmannsfluch.
  • Univers uchroniques : dans Château Falkenstein ou Ars Magica, le mélange d’ancien et de moderne colle parfaitement.

  1. La Dernière Licorne ↩︎
  2. VIVA est une chaîne de télévision musicale allemande du groupe Viacom International Media Networks Europe, active entre 1993 et 2018. Durant son existence, elle est diffusée notamment sur le satellite Astra 1 à 19,2°E. ↩︎


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Commentaires

4 réponses à “In Extremo — du feu, des cornemuses et du metal”

  1. Avatar de Etienne

    je ne connaissais pas, je vais approfondir

    1. Avatar de scriiiptor

      A choisir, c’est mieux de regarder des live. C’est beaucoup mieux que les clips.
      Bon, faut aimer le métal et les cornemuses. Mais qu’est ce que c’est sympa.

  2. Avatar de Anagrys

    Même remarque qu’Etienne

    1. Avatar de scriiiptor

      Ah ben même réponse.
      Pas mieux.

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