Quelle drôle d’idée que d’avoir envie de rejouer à Trauma, un jeu de rôle sortie il y a plus de 35 ans ? Voici, ce qui m’y a poussé et comment je pense résoudre quelques obstacles.
Trauma, mais qu’est-ce donc ?
Pour rappel dans la version initiale du jeu (COM n°1 en 1986), il était possible de s’incarner soi-même. Cette possibilité a été supprimée de la version livre (en 1988), seuls des personnages aventureux et un peu hors du commun sont acceptés (par exemple grand reporter, inspecteur de police, détective privé, pilote d’avion ou d’hélicoptère, mercenaire, truand, aventurier…).
Trauma édité en livre à couverture dure par Aujourd’hui Communication en 1988 (72p, 149 FF). L’illustration de couverture signée Fredy donne le ton : aventures, femmes fatales, courses poursuites et gros balaises avec des flingues.
Si je reviens sur ce changement de style entre les deux versions c’est parce que je pense que c’est probablement ce qui a fait que je me suis désintéressé de ce jeu. Peut-être aussi que je n’ai pas été le seul ?
Se jouer soi-même ?
Si l’idée de se jouer soi-même est un peu hard et malvenue parfois, elle traduisait pourtant une idée intéressante : jouer des personnages issus du quotidien réel et pas des aventuriers.
Et donc, ce qui devenait intéressant dans les scénarios, c’était de voir comment le simple quidam pouvait se retrouver confronter à des aventures le sortant de son ordinaire. Et comment il pouvait s’en sortir avec ses connaissances et compétences pour le moins classiques.
Le côté “Trauma” qui donne le titre au jeu de rôle est au fil du temps devenu un peu moins présent. Et encore une fois, dans la dernière version façon, le côté “aventuriers modernes” gomme un peu l’aspect Trauma. En effet, il pouvait être tout aussi intéressant de tenter de jouer sur les traumatismes affrontés par les personnages.
Jouer « banal »
Alors, oui, il faut bien avouer que jouer quelqu’un de “banal” dans un monde contemporain sans magie, sans fantastique, ça n’a pas forcément fait rêver des masses de joueuses et joueurs.
Et des scénars où l’on pouvait tout à coup se retrouver pris au piège par des tueurs en série ou autres mercenaires armés (eux), ça n’a pas donné envie à tout le monde…
Surtout que le temps consacré à la création de personnage pouvait être terriblement long… à cause des nombreux calculs à faire pour compléter correctement la fiche de personnage. Et si c’était pour faire un personnage à la durée de vie limitée, il faut dire que cela n’en valait pas vraiment la chandelle.
Oui, a priori, si l’on se lance dans cette tâche, c’est pour un minimum de plaisir dans la victoire face à l’adversité, et l’envie de faire progresser son personnage. Hors, dans un jeu de rôle contemporain et sans magie ni fantastique, il n’est pas facile de transformer d’un scénario à l’autre le personnage “banal” en un “Rambo”…
Bref, il y a pas mal d’obstacles qui rendent le jeu de rôle Trauma peu jouable sur la durée… en apparence :
- Contemporain, sans magie et sans fantastique ;
- Réaliste (ou se voulant réaliste) ;
- Des règles simulationnistes ;
- Une création de personnage très longue et complexe ;
- Un gros catalogue d’armes donnant l’impression que le jeu est basé sur ça ;
- Des règles de combat qui donnent des affrontements mortels très rapidement ;
- Des règles sur la santé mentale vite expédiées ;
- Et j’oublie peut-être d’autres choses ?
Contemporain, sans magie et sans fantastique ?
Le monde contemporain ne représente pas uniquement la période que l’on vit aujourd’hui ! Il faut se souvenir qu’une version Trauma “Ouest Sauvage” existe aussi.
Et qu’il faut juste quelques retouches au jeu de base pour jouer dans d’autres périodes historiques du 19ème siècle, du 20ème siècle et du 21ème.
Cela laisse donc pas mal de choix un peu dépaysant, et cela même si on n’inclut aucun fantastique. Sans fantastique ne signifie pas sans mystères ou sans aventures.
Et si jouer dans les années 2020 ne semble pas si fun que ça, on peut penser à l’ouest sauvage juste après la Guerre de Sécession, la Belle Époque en France, la Révolte des Boxers en Chine en 1900, les années folles, les années 30, la 2nde guerre mondiale vécue par les populations civiles, la Guerre Froide, la chute du Mur de Berlin, etc jusqu’à nos jours.
Les moments de l’Histoire récente où des personnages “ordinaires” ont pu jouer un rôle ne manquent pas, il s’agit simplement de se choisir.
Réaliste (ou se voulant réaliste)
On n’arrive jamais à être aussi réaliste que l’on voudrait, car on risque d’être trop tatillon et ce n’est pas forcément non plus le but recherché…
L’idée serait peut-être de juste “essayer” et de faire comme si c’était réaliste (ou juste vraisemblable). En gros, peu importe si les dégâts de telle ou telle arme ne sont pas comme ça dans la réalité. L’idée c’est juste que tout le monde autour de la table l’accepte. Cela reste du jeu de rôle, le but c’est de s’amuser, pas de faire de la simulation ultra réaliste.
Des règles simulationnistes
Et oui, on y vient ! Les règles de Trauma peuvent sembler très simulationnistes. A mon sens ce n’est qu’une impression. Trauma reste un jeu assez “léger”, vous constatez assez vite qu’il ne s’agit pas d’un jeu avec beaucoup de règles pour tout simuler. Au contraire, il y a vraiment juste le strict minimum. Ce qui laisse énormément de marge pour qu’un meneur de jeu (le Traumato) puisse improviser ses propres règles.
Une création de personnage très longue et complexe
Bon, oui, c’est vrai, c’est horrible. Ou plutôt c’était le cas au moment où le jeu est sorti (fin des années 1980)…
Mais maintenant, avec un tableur, c’est hyper rapide ! Vous programmez votre fiche de personnage pour faire les calculs et hop, un personnage se fait vraiment très vite.
un gros catalogue d’armes donnant l’impression que le jeu est basé sur ça
En fait, ce catalogue d’armes est très trompeur ! Parce que si vous regardez bien, les armes ne sont pas si détaillées que ça, et l’aspect “simulationniste” est trompeur.
A part le calibre, le nombre de balles dans le chargeur et le mécanisme, tout le reste n’a quasiment aucune importance. Pas d’indication de portée ou de bonus divers dû à la qualité de l’arme, ou poids ou taille… Rien. C’est au meneur de juger du réalisme, ou juste faire au plus simple.
Des règles de combat qui donnent des affrontements mortels rapidement.
Les règles de combat peuvent sembler un peu complexes. Mais elles ne le sont pas autant que celles de James Bond 007, dont elles s’inspirent fortement. En fait, on peut tout à fait choisir de les simplifier ou au contraire de se focaliser dessus.
Comme beaucoup de jeux de rôle, c’est un test dit « d’initiative » qui va déterminer qui agit en premier, donc qui tire le premier dans un affrontement par arme à feu. Des modificateurs en plus ou en moins vont ajuster le résultat. A mon sens, ce petit calcul ralenti un peu l’action, mais c’est aussi le moment d’utiliser ce temps pour installer du climax. A la façon d’une bonne scène de cinéma au ralenti.
Des règles sur la santé mentale vite expédiées
Trauma n’est pas l’Appel de Cthulhu, donc les règles de gestion de la Santé mentale (Équilibre Mental) sont peu détaillées, voire presqu’inexistantes. Même si une adaptation de règles pourraient être envisagée, ce serait dommage de rajouter un autre compteur.
D’ailleurs dans Trauma, les règles de l’Équilibre Mental sont surtout intéressantes si l’on les utilisent en complément de celles des Points de Volonté.
Presque tout faire avec Trauma ?
Trauma pourrait fort bien faire une bonne base pour un système de jeu de rôle générique. C’est d’ailleurs ce que pas mal de joueurs et meneurs de jeu ont fini par faire.
- Les règles de l’Ouest sauvage sont une création officielle qui datent de Chroniques d’Outre Monde n°10.
- Sur Loukoum Online vous pouvez trouver de quoi faire de la SF avec Trauma : http://loukoum.online.fr/jdr/adj/traumasf.htm
- Sur la Gonel Zone on peut trouver de quoi faire du Post-Apocalyptique : https://www.gonel-zone.fr/jeux-de-r%C3%B4le/troma-post-apo/
- Sur Rêves d’Ailleurs ont peut trouver de quoi faire du médiéval (avec et sans magie)
Faire bourrin ? ou subtil ?
Vous l’aurez compris, avec Trauma il en faut peu pour tomber dans le style bourrin hyper militariste gros bill. On se recommandera de ne pas laisser trainer trop d’armes à feu dans les scénario, ni de céder à la facilité de faire des scénars à base de mercenaires et autres tueurs à gages.
Commentaires
2 réponses à “Rejouer à Trauma”
J’adore que Système D est une compétence ! Je ne veux pas vraiment jouer en tant que moi-même, mais ça donne des idées pour imaginer ma quotidienne au-delà des attributs classiques de D&D. (Ce qui est comment je vois le monde habituellement.)
Se jouer soi-même n’est pas vraiment une bonne idée. Mais jouer des personnages avec quelques faiblesses ou au moins sans forces extraordinaires c’est assez intéressant.
Pour aller plus loin que ce qui est dit dans l’article, disons que c’est intéressant parce que cela permettrait par exemple de mettre en avant l’astuce et les choix des joueurs plutôt que les compétences des personnages et la chance aux dés.
C’est assez simple à faire, mais ça demande de réfléchir autrement : pour les personnages joueurs ça veut dire »ne pas foncer dans le tas » et »ne pas privilégier l’affrontement physique ».