Marie-Louise Jeanne Peyrat, marquise Arconati-Visconti, surnommée la marquise rouge, est une collectionneuse, mécène et philanthrope française (1840-1923).
Une biographie inspirante ?
La jeunesse de Marie-Louise
Marie-Louise-Jeanne Peyrat est née le 26 décembre 1840 à Paris. Elle est la fille du journaliste et homme politique Alphonse Peyrat et de Marie Pauline Thérèse Risch. Élevée dans le culte de la Révolution inculqué par son père, elle sera plus tard sensible aux idées progressistes.
Au cours de sa jeunesse, elle habite le boulevard Saint-Michel Ă Paris. Elle suit alors en auditrice libre les cours de l’École des chartes, ainsi que ceux de la Sorbonne et de l’École du Louvre. PassionnĂ©e d’histoire, de philosophie et des institutions politiques, elle frĂ©quente rĂ©gulièrement l’AssemblĂ©e nationale oĂą siège son père et affiche progressivement ses engagements socialistes et rĂ©publicains ainsi que son anticlĂ©ricalisme.

Un mariage d’amour
Son père, qui a pris fait et cause pour les idĂ©es du Risorgimento, frĂ©quente le milieu des exilĂ©s Italiens en France dont l’un, le marquis Giuseppe Arconati Visconti, sĂ©nateur italien nĂ© Ă Milan en 1797, qui habite Ă Paris. C’est ainsi que Marie-Louise-Jeanne Peyrat rencontre Gianmartino, le fils de Guiseppe et de Costanza Trotti-Bentivoglio.

Gianmartino Arconati-Visconti, nĂ© le 11 novembre 1839 Ă Pau, est un intellectuel et un artiste qui participe aux campagnes d’Italie de 1860-1861 et aux dernières batailles de l’unification italienne. Marie-Louise-Jeanne Peyrat a un coup de foudre pour Giammartino. Elle l’Ă©pouse en novembre 1873 en dĂ©pit du dĂ©saccord de la famille Arconati ; elle, une rĂ©publicaine anticlĂ©ricale et lui, un noble royaliste catholique. Par ce mariage, Marie-Louise devient alors la marquise Arconati-Visconti.

Le couple se rend en Italie, oĂą Gianmartino est aide de camp du roi Victor-Emmanuel II. Mais Gianmartino y dĂ©cède trois ans plus tard, Ă Florence, le 23 fĂ©vrier 1876, d’une fièvre typhoĂŻde.

Ă€ la mort de son mari, Marie-Louise Arconati-Visconti hĂ©rite d’une immense fortune, dont des domaines en Lombardie et en Belgique, le château de Gaesbeek, près de Bruxelles, un hĂ´tel particulier rue Barbet-de-Jouy Ă Paris et divers palais Ă Rome et Ă Florence.

Elle s’installe alors Ă Paris, mais sĂ©journe aussi au château de Gaesbeek qu’elle embellit, et consacre la fortune qui lui Ă©choit Ă l’achat d’Ĺ“uvres d’art et au mĂ©cĂ©nat.


Études et intérêts artistiques et politiques
PassionnĂ©e d’histoire de l’art, elle achète principalement des ouvrages de bibliophilie, des Ĺ“uvres et objets d’art mĂ©diĂ©val et d’art islamique.

Elle tient par ailleurs un salon littĂ©raire dans son hĂ´tel particulier au numĂ©ro 16 de la rue Barbet-de-Jouy et ce jusqu’en 1914. Le mardi est la journĂ©e des amateurs d’arts et des collectionneurs ; le jeudi est celle des politiques.

Elle y reçoit des personnalités progressistes comme Léon Blum, Georges Clemenceau, Émile Combes, Léon Gambetta, Jean Jaurès et Raymond Poincaré, à qui on donne le nom de « jeudistes » car cette société se réunissait le jeudi.
C’est lors de ces rĂ©unions que la marquise prend fait et cause pour le capitaine Dreyfus, avec lequel elle Ă©changera plus tard une correspondance soutenue. Elle lie aussi une amitiĂ© intellectuelle avec Jean Jaurès.
Au cours d’un de ses dĂ©jeuners du mardi, la marquise fait connaissance de Raoul Duseigneur, un autre collectionneur et amateur d’arts. NĂ© en 1846, il est le fils d’Édouard Duseigneur, frère du photographe Paul Duseigneur, et de Louise KlĂ©ber, fille du cofondateur des papeteries Blanchet Frères et KlĂ©ber ; son frère est le peintre-graveur Georges Duseigneur. Raoul sera le compagnon de Marie-Louise de 1889 jusqu’Ă sa mort en 1906. Auprès de lui, elle acquiert des nombreuses connaissances sur l’art du Moyen Ă‚ge, de la Renaissance et de l’Orient.
L’Ă©volution de la situation politique en France au dĂ©but du XXe siècle, Ă la veille de la Première Guerre mondiale, provoque des brouilles au sein des « jeudistes ». Les oppositions s’expriment entre les pacifistes, tels Jean Jaurès, et les nationalistes que soutient le clan Arconati. AffectĂ©e par ces brouilles, Marie-Louise Arconati-Visconti quitte en 1914 son hĂ´tel particulier de la rue Barbet-de-Jouy pour un petit appartement de deux pièces situĂ© au numĂ©ro 3 de la rue de la SantĂ©, dans une clinique oĂą Raoul est soignĂ©, puis pour un autre appartement au numĂ©ro 3 de la rue ÉlisĂ©e Reclus. Elle vend son hĂ´tel particulier en 1920.
Mécénat
Plaque de l’Institut d’Histoire de l’Art fondĂ© par la marquise Arconati-Visconti en souvenir de Raoul Duseigneur.
Son mĂ©cĂ©nat, qu’elle pratique avec plus d’assiduitĂ© Ă partir de 1892, porte essentiellement sur l’enrichissement de collections de bibliothèques et de musĂ©es, ainsi qu’en faveur de l’enseignement supĂ©rieur sous diffĂ©rentes formes. Dans le premier domaine, elle donne de nombreux livres Ă la Bibliothèque municipale de Lyon. Ses collections d’art sont majoritairement attribuĂ©es au musĂ©e du Louvre, oĂą il existe d’ailleurs une salle Arconati-Visconti.
Dans le domaine de l’enseignement supĂ©rieur, elle fonde un prix, Ă la mĂ©moire d’Auguste Molinier, destinĂ© Ă rĂ©compenser chaque annĂ©e la meilleure thèse de l’École des chartes. Elle fonde aussi deux autres prix, l’un en sciences, l’autre en lettres et sciences humaines, dĂ©cernĂ©s annuellement Ă des thèses de doctorat soutenues dans l’une des universitĂ©s de Paris. Elle fait un don de deux millions de francs, complĂ©tĂ© ensuite d’un autre don d’un million, pour la crĂ©ation de l’Institut d’art et d’archĂ©ologie, sa principale Ĺ“uvre, construite après sa mort sur les plans de Paul Bigot, rue Michelet, et destinĂ© Ă accueillir les cours d’histoire de l’art de la Sorbonne. Elle est aussi Ă l’origine de l’Institut de gĂ©ographie de Paris, dont elle finance la construction Ă partir de 1914.
Elle rachète la bibliothèque du philologue Gaston Paris et la donne Ă l’État, pour qu’elle soit confiĂ©e Ă l’École pratique des hautes Ă©tudes. Elle fonde par ailleurs, Ă Strasbourg, la Villa Arconati-Visconti, destinĂ©e Ă hĂ©berger les Ă©tudiants. Dans le domaine social enfin, elle institue une fondation en faveur des familles de policiers tuĂ©s en service.