Léna Bernstein

Léna Bernstein est une aviatrice française d’origine russe, née à Leipzig (Allemagne) en 1906 et morte à Biskra (Algérie) le 3 juin 1932. Biographie Les parents de Léna Bernstein, d’origine russe, ont émigré en Allemagne, puis en France. Léna obtient son brevet de pilote à l’école civile d’Aulnat, près de Clermont-Ferrand, sous la protection des…

lena bernstein

Léna Bernstein est une aviatrice française d’origine russe, née à Leipzig (Allemagne) en 1906 et morte à Biskra (Algérie) le 3 juin 1932.

Biographie

Les parents de Léna Bernstein, d’origine russe, ont émigré en Allemagne, puis en France. Léna obtient son brevet de pilote à l’école civile d’Aulnat, près de Clermont-Ferrand, sous la protection des as de 14-18 Gilbert Sardier et Louis Chartoire. Elle « monte » à Paris avec l’intention de battre des records. Sans fortune, elle doit se battre en permanence pour parvenir à satisfaire sa passion du vol. Elle vole sur un Potez VIII, puis obtient le prêt du Caudron C.109 no 2 de Maurice Finat, as de la voltige aérienne.

Premier record de distance en ligne droite

En 1929, elle tente le record de distance en ligne droite, en traversant la mer Méditerranée. Les autorités ne l’autorisent qu’à tenter son essai vers le nord, ce qui lui est impossible car son petit Caudron C.109 motorisé par un Salmson 40 ch, surchargé de carburant, mettra du temps pour atteindre une altitude suffisante : sa seule solution est de faire semblant d’obtempérer, mais de partir vers le sud et de survoler la Méditerranée. Le premier essai s’arrête quelques kilomètres après s’être engagée au-dessus de la Méditerranée : secouée par un très fort mistral, l’aviatrice doit se résoudre à vider son carburant et faire demi-tour. Asphyxiée par les vapeurs d’essence, elle perd connaissance, mais elle réussit à poser son avion à la dernière minute, suscitant l’admiration pour son atterrissage impeccable avec un vent violent.

Elle repart le lendemain, dans de meilleures conditions. Au-dessus de la Corse, elle s’aperçoit que son réservoir est presque vide : le robinet du « vide-vite », ouvert la veille, a été mal refermé. Elle doit se poser d’urgence sur l’aérodrome italien de Pise, alors sous le commandement de l’armée de l’air de Mussolini. On lui reproche de n’avoir pas d’autorisation de survol de l’Italie et l’avion est confisqué. Le lendemain, au prétexte de montrer à un mécanicien un problème technique, Léna s’installe aux commandes et réussit à décoller, abandonnant sur place sa combinaison de vol, son casque, ses cartes…

Enfin à sa troisième tentative, le 19 août 1929, elle franchit sans escale, d’Istres à Sidi Barrani en Égypte, la distance de 2 268 km. Elle est le second pilote, et la première femme, à traverser la Méditerranée en solitaire après l’exploit de Roland Garros datant du 23 septembre 1913.

Record de durée en circuit fermé

En 1930, elle s’attaque au record de durée que détient Maryse Bastié (26 h 47). Les 1er et 2 mai, sur le Farman F.192 no 4 immatriculé « F-AJLU » spécialement préparé, elle vole pendant 35 h 45, battant le record de durée de pilote seul à bord détenu jusque-là par Lindbergh. Maryse Bastié lui reprendra ce record en septembre, sur un Klemm, appareil plus puissant.

Tentatives de raid

Après son record, elle continue à voler sur le même appareil, en préparant un raid jusqu’à Tokyo, avec le mécanicien Guitton. Le raid est sponsorisé par les Galeries Lafayette, dont le nom est peint sur le fuselage. Après de multiples déboires, ils décollent le 8 novembre 1930 de Toussus-le-Noble, mais ce raid sera un échec.

En 1931, Léna Bernstein tente un raid sur Saïgon qui s’interrompt par un atterrissage forcé en Inde. Elle doit se battre pour obtenir un nouvel avion, réussit à avoir le Farman F.230, moteur Salmson AD9 40CV, no 10 « F-ALGJ », pour reprendre son projet de raid, grâce à un mécène, Guy Guidotti, en échange de leçons de pilotage. Le petit appareil est baptisé Zanzi, en présence d’Henri Farman, par la comtesse Pélissier de Malakoff, le 16 avril 1931 à Toussus-le-Noble. Le 30 mai 1931, à 3 h du matin, à sa deuxième tentative de décollage, l’avion surchargé de 415 litres de carburant est renversé par une rafale de vent, sur une piste en réfection à Istres. Léna Bernstein, blessée à la tête, une cheville brisée, de multiples contusions, est transportée à l’hôpital de la Conception de Marseille.

Un industriel marseillais, ancien pilote de guerre, lui fournit un nouvel appareil : un Farman F.236 no 3 « F-AMLB », version monoplace de record du F-230, à l’envergure légèrement agrandie. Encore mal remise, Léna quitte l’hôpital sans payer les soins.

Dernier raid

En 1932, elle obtient la nationalité française. Elle prépare un nouveau raid, qui consisterait à rallier Biskra, en Algérie, à Bagdad, en survolant le sud tunisien, 900 km de mer, puis l’Égypte et les montagnes du Liban. Elle s’est rendue à Biskra quelque temps avant pour y préparer son départ. Interdite de vol par l’administration, poursuivie par les huissiers, elle réussit en juin à atteindre Alger en trompant la vigilance des autorités, puis l’aérodrome de Biskra, où le petit Farman est renversé par une tempête. Les dégâts sont minimes. L’aviatrice est accueillie et entourée par de nombreux amis : le maire de Biskra et son épouse, le général du Jonchay, le colonel Pierre Weiss, Lucien Schmidt, président du Comité d’Aviation de Tourisme de Biskra… Mais elle est épuisée, physiquement et moralement. Le 3 juin, elle se fait conduire en taxi dans le désert, puis renvoie le chauffeur. On retrouvera son corps deux jours plus tard, auprès d’une bouteille de champagne et d’un tube de médicaments vide.

Léna Bernstein est enterrée au cimetière de Biskra. Quelques mois plus tard, son adversaire et amie Maryse Bastié vient se recueillir sur sa tombe.

La mort tragique

Extrait du n°82 de Police Magazine – 19 juin 1932

Jeu de rôle et autres inspirations

J’évoque depuis quelques temps l’histoire de ces aviatrices et pilotes téméraires, et celle de Lena Bernstein me donne à chaque fois des frissons quand je la lis.

Ci-dessous un essai de fiche de perso pour le tout nouveau Savage Worlds Adventure Edition. Une fiche dont je ne suis pas entièrement satisfait pourtant.

On devine derrière tout cela une femme entière, passionnée, capable d’aller au bout de son envie de réussir. Et pourtant cette passion semble aussi avoir eu raison de sa santé psychique.

Aviatrice, un roman de Greg Lamazères

Le destin de Léna Bernstein, une aviatrice ébouriffante, étincelante et tragique des années 20 en France et, à travers elle, l’histoire des femmes qui se sont battues pour exister en dehors des conventions et vivre leur passion de l’aviation et du sport dans un monde dominé par les hommes, telles Adrienne Bolland, Maryse Bastié, Amy Johnson, Keith Miller, Marga Von Etzdorf et tant d’autres.
Dans le cas de Léna, il y a par ailleurs une revanche à prendre sur les coups du destin et la douleur de l’exil, sous le regard d’un père qui a connu l’humiliation et la défaite, en tant que Russe blanc, en tant que Juif.
Mais, avec son éternel sourire et ses cheveux roux, en costume de cuir comme en robe dernier cri, elle est la coqueluche de la presse et fait à tous l’effet d’une torche que n’éteint pas le vent. Elle sait ce qu’elle vaut pour ceux qui l’emploient et se servent d’elle. Ses exploits frappent l’imagination en démontrant que voler n’est pas qu’un jeu réservé à des fous. C’est l’avenir de l’homme en mouvement. Elle donne un visage à l’industrie en échange de voyages en solo à travers le ciel.
Le narrateur du roman, journaliste sportif un peu désabusé et presque amoureux, enquête sur le destin aventureux et les escales hasardeuses de cette femme pilote sur laquelle plane une ombre ; il la voit féminine et conquérante, mutine et travailleuse, toujours dans l’action ou le nez sur les cartes, une coupe de champagne à la main et des rires en cascade, à la recherche de records à battre et de de bolides de l’air à éprouver ; y perdant des plumes, et enfin tout ce qu’elle possède, jusqu’au goût de la vie.
C’est un voyage parmi les pionniers de l’aviation, durant les Années folles, sur les traces d’une héroïne qui se libère en se jetant, pour le compte des constructeurs Caudron et Farman, dans des tribulations interdites au-dessus de la Méditerranée et des sables du désert, d’un terrain de fortune à l’autre, aux commandes de petits avions qu’on pourrait briser entre ses doigts, puis de grandes machines gonflées à bloc. Malmenée par les vapeurs d’essence et les vents déments, dupée par la lune et les feux éteints, grugeant gentiment ses patrons et commanditaires pour la bonne cause (la sienne), buvant pour se donner du courage, fuyant le passé à tire-d’aile en avalant des barbituriques, ravissant à ses amies et rivales des records de distance et de durée, volant à l’aveuglette ou la tête en bas, s’écrasant ici et là, sauvée par un Bédouin, mise aux arrêts dans une caserne en Italie, se brisant les os, échouant à Marseille avec une robe grise pour toute possession, rebondissant dans un dernier coup de rein, tout ça pour finir ensablée à Biskra, une ville touristique du sud algérien surnommée la « Reine des Zibans », port d’attache de nombreux aviateurs et, pour elle, le dernier stop.

Greg Lamazères


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