Le jeu de rôle entre intimité et grand public

On veut que le jeu de rôle soit connu, reconnu, compris, célébré, enseigné, démocratisé.
Mais parfois, on rêve juste de se retrouver entre nous, autour d’une table, avec nos vieilles vannes, nos fiches de perso écornées et nos règles mal appliquées.
On veut faire des articles, des vidéos, des podcasts, des fanzines.
Mais on ne veut pas devoir expliquer notre passion à des gens qui n’écoutent pas vraiment.
Et on ne veut pas se prendre des murs d’opinions agressives parce qu’on a osé dire que la v2 c’était mieux.
Ou pire : qu’on joue sans écran, sans dés, sans MJ, sans respect des conventions.
Le jeu de rôle est paradoxal. Il se joue en petit comité, mais il appelle au récit collectif.
Il est confidentiel, mais il explose de créativité.
Il est intime, mais il donne naissance à des mondes immenses.
L’envie de partager
Partager, c’est naturel.
Quand une partie a été folle, quand un perso a survécu par miracle, quand une impro de MJ a donné des frissons à toute la table… on a envie de raconter.
On a envie de dire « tu te souviens de cette scène ?« , même à des gens qui n’y étaient pas.
Et puis il y a cette envie plus grande encore : transmettre.
Faire découvrir le jeu à des nouvelles personnes, ouvrir la porte à celles et ceux qui n’ont jamais osé franchir le seuil.
Montrer que le jeu de rôle n’est pas réservé à une élite.
Qu’il n’est pas qu’un trip d’ados blancs hétéros fans de fantasy.
Qu’il peut être queer, féministe, politique, sensible, bizarre, ou simplement très drôle.
Mais pour ça… il faut parler. S’exposer. Créer des ponts.
L’envie de se barrer
Mais à force de vouloir parler, on finit par crier dans une foire d’empoigne.
Les réseaux sont devenus des arènes.
Les forums, des champs de bataille sémantiques.
Et parfois, on a juste plus envie.
Plus envie de justifier pourquoi on joue comme ça.
Plus envie de lire des débats sur « c’est pas du vrai JdR« .
Plus envie de voir le jeu qu’on aime réduit à un produit, un branding, une licence à vendre.
Alors on se coupe. On débranche.
On se dit que l’underground, c’est peut-être pas si mal.
Et on retrouve ce que le jeu avait toujours été : un truc de niche, un truc de potes, un truc à soi.
Les deux à la fois ?
Et si la solution, c’était pas de trancher ?
Mais de naviguer.
Parfois on partage.
Parfois on replonge dans l’ombre.
Parfois on écrit un article pour tout le monde.
Et parfois, on fait une partie secrète dans not’ salon avec des feuilles volantes.
On peut vouloir que le jeu de rôle s’ouvre, se diversifie, prenne de la place dans le monde.
Et en même temps, on a le droit de préserver des espaces à nous, loin du bruit, loin des regards.
Ce n’est pas de la contradiction. C’est de la respiration.
Et nous, alors ?
Scriiipt, c’est un peu ça.
On écrit, on partage, on publie.
Mais on bidouille aussi dans un coin.
On désindexe.
On envoie des lettres qu’on cache à moitié.
On veut faire connaître.
Mais peut-être pas n’importe comment.
On veut parler de jeu de rôle comme on le vit vraiment : un mélange d’intime et d’universel.
Un truc qui fait grandir, parfois.
Et qui, souvent, sauve les soirs de semaine.
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29 réponses à “Partager sans s’exposer, créer sans s’épuiser”