Dans les années 1930, Hollywood entre dans l’ère du Code Hays, une série de règles de censure imposées au cinéma américain jusqu’en 1968. Ce code, officiellement nommé Motion Picture Production Code, régit ce qui pouvait être montré à l’écran sous prétexte de protéger la moralité du public.
Mais au-delà de la simple réglementation, le Code Hays a façonné une vision du monde très particulière, influençant profondément la production cinématographique de l’époque.
Avant le Code Hays : l’âge d’or du « pré-Code »
Avant 1934, Hollywood connaît une période de grande liberté artistique souvent désignée sous le nom de « cinéma pré-Code ». Sans règles strictes, les films explorent des thèmes aujourd’hui surprenants par leur audace : sexualité décomplexée, violence crue, corruption et critique sociale.
Quelques exemples marquants :
« Baby Face » (1933), où Barbara Stanwyck incarne une femme usant de son charme pour gravir les échelons du monde des affaires.


« Scarface » (1932), inspiré de la vie d’Al Capone, qui glorifie le crime avec un ton brutal et réaliste.


« Red-Headed Woman » (1932), où Jean Harlow joue une séductrice manipulatrice qui ne reçoit aucune punition morale.


Les films de Mae West, à l’humour grivois et aux dialogues suggestifs, qui choquent les ligues de vertu.



Cette période prend fin en 1934 lorsque le Code Hays commence à être appliqué rigoureusement, transformant radicalement la production cinématographique américaine.
Hollywood sous surveillance
Après les scandales qui éclaboussent le Hollywood des années 1920 (affaires de mœurs, consommation de drogues, accusations de viol et de meurtre), l’industrie du cinéma se trouve sous le feu des critiques. Pour éviter une législation gouvernementale plus stricte, les studios prennent les devants et adoptent en 1930 le Code Hays, du nom de Will H. Hays, ancien directeur des postes des États-Unis et fervent presbytérien.


Le code stipule notamment que :
- Les relations sexuelles hors mariage ne doivent pas être glorifiées.
- La nudité et les danses lascives sont interdites.
- Le crime ne doit jamais être présenté sous un jour positif ou impuni.
- Les figures d’autorité (policiers, prêtres, juges) doivent être respectées.
- Les références à l’homosexualité sont bannies (alors qualifiées de « perversions »).
- La religion doit être représentée avec respect.
Les producteurs doivent alors s’auto-censurer, donnant naissance à un cinéma fait de sous-entendus et de contournements habiles pour suggérer ce qui ne peut être montré frontalement.
La fin du Code Hays et le contrôle moderne du cinéma
Le Code Hays commence à perdre de son influence dans les années 1950, avec l’émergence de productions plus audacieuses et la montée de la télévision. En 1968, il est officiellement remplacé par le système de classification par âge de la MPAA (Motion Picture Association of America), qui permet plus de liberté tout en informant le public sur le contenu des films.

Aujourd’hui, le cinéma est toujours régulé, mais d’une manière différente :
- Aux États-Unis, le système de classification MPAA (G, PG, PG-13, R, NC-17) guide les spectateurs sans imposer une censure stricte.
- En France, le CNC (Centre national du cinéma) attribue des visas d’exploitation et peut interdire des films aux mineurs.
- Certains pays appliquent encore des censures drastiques, comme la Chine ou l’Arabie Saoudite, où des films peuvent être coupés ou interdits pour des raisons politiques ou morales.
- La pression économique et sociétale oriente aussi la production : les studios évitent parfois certains sujets polémiques pour ne pas froisser certains marchés internationaux.
Ainsi, si le Code Hays n’existe plus, des formes de contrôle continuent d’exister, qu’il s’agisse de régulation officielle ou d’autocensure dictée par des impératifs commerciaux.
Inspirations pour le jeu de rôle
Le Code Hays et ses équivalents européens peuvent être d’excellentes sources d’inspiration pour des intrigues en jeu de rôle, en particulier dans des univers pulp, noirs ou dystopiques. Quelques pistes :
- Une enquête dans l’Hollywood des années 1930-40, où des cinéastes tentent de contourner la censure en insérant des messages codés dans leurs films.
- Un univers où un code moral strict est imposé, et où les personnages doivent naviguer entre secret et rébellion pour exprimer leurs idées.
- Un scénario autour d’un film interdit, dont la projection clandestine pourrait déclencher un scandale, voire une révolution culturelle.
- Une ville sous un régime oppressif, où l’art et la création sont surveillés, et où les joueurs doivent faire circuler des œuvres interdites.
Le Code Hays, en cherchant à formater le cinéma, a paradoxalement donné naissance à des films où l’implicite et le sous-texte jouent un rôle central. Pour le jeu de rôle, cette tension entre la contrainte et la créativité peut donner des scénarios riches et subtils.
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