14 Juillet : Bastille, Fédération et bordel historique

Depuis 1880, le 14 juillet est officiellement devenu la fête nationale. Mais surprise : Le texte de loi ne mentionne ni 1789 ni la Bastille. Les débats parlementaires de l’époque révèlent un choix volontairement flou entre deux événements.

14 juillet 1789 bastille

On pense souvent que le 14 juillet célèbre exclusivement la prise de la Bastille en 1789. C’est vrai… mais ce n’est pas toute l’histoire.


Deux 14 juillet pour le prix d’un

Depuis 1880, le 14 juillet est officiellement devenu la fête nationale. Mais surprise :

  • Le texte de loi ne mentionne ni 1789 ni la Bastille.
  • Les débats parlementaires de l’époque révèlent un choix volontairement flou entre deux événements.

Pourquoi cette ambiguïté ? Parce que les républicains de la Troisième République, fraîchement installés, sortaient d’une guerre, d’une Commune et de tensions royalistes. Pas idéal pour glorifier une insurrection populaire sanglante.

Ils ont donc opté pour une commémoration plus apaisée : la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790, grande cérémonie d’unité nationale où Louis XVI lui-même a prêté serment à la Nation, sous la bénédiction de Talleyrand. L’éphémère réconciliation.

En résumé :

  • 14 juillet 1789 : prise de la Bastille, quelques prisonniers libérés, symbole fort, début d’une insurrection qui dépasse tout le monde.
  • 14 juillet 1790 : grande messe civique républicaine, ambiance champêtre, chants, bannières et poignées de mains officielles.

Aujourd’hui, on célèbre un peu les deux à la fois. Mais sans trop en parler.


Idée JDR : La prise de la Bastille, version historique et chaotique

Si vous cherchez un scénario de jeu de rôle historique sans fantastique, la prise de la Bastille est un cadre parfait. Pourquoi ? Parce que c’est un bordel total.

  • Les insurgés sont mal organisés.
  • La garnison est réduite et décourage.
  • La communication entre les camps est défaillante.
  • Les objectifs des insurgés sont flous, contradictoires.

Des ouvriers chopent de la poudre aux Invalides. Des miliciens mal armés encerclent une prison presque vide. Le gouverneur de Launay panique. Des coups de feu partent. Et la suite est sanglante.

Autrement dit : c’est du matériel brut pour un scénario de chaos semi-organisé.

Les PJ peuvent être :

  • des révolutionnaires sincères,
  • des espions à double ou triple jeu,
  • des journalistes engagés,
  • des truands qui flairent un coup à jouer,
  • ou juste des passants pris dans la tourmente.

Mode de jeu possible :

  • Polar politique,
  • Drame historique,
  • Survival urbain,
  • ou version « carnet de bord » à la première personne.

Et si on veut saupoudrer un peu de fantastique, sans tomber dans la caricature, la campagne Le Règne de la Terreur pour L’Appel de Cthulhu fournit d’excellents ressorts pour mêler tension historique et mystères surnaturels.


Bonus (presque sérieux) : La Bastille cachait-elle autre chose ?

Et si, au-delà des prisonniers officiels, on avait retrouvé des manuscrits interdits ? Un prisonnier masqué ? Une cellule murée ? Des artefacts inavouables liés à l’Ancien Régime ou à un passé bien plus ancien encore ?

De quoi amorcer une campagne entre les mondes, entre l’histoire et la paranoïa… mais chut, restons (presque) réalistes pour aujourd’hui.



Commentaires

7 réponses à “14 Juillet : Bastille, Fédération et bordel historique”

  1. Avatar de princecranoir

    « Un beau matin de juillet le réveil
    A sonné dès le lever du soleil
    Et j’ai dit à ma poupée faut te s’couer
    C’est aujourd’hui qu’il paaasse… »

    1. Avatar de scriiipt

      Et puis on est descendu chez Satan
      Et en bas c’était épatant

  2. Avatar de Anagrys
    Anagrys

    Souvenir de classe de seconde : la prise de la Bastille n’avait rien du soulèvement populaire contre l’arbitraire royal (qui, sous monsieur XVI, était plutôt en berne, ce dernier ayant toutes les peines du monde à faire enregistrer ses édits par le Parlement de Paris, et ayant très peu usé de la lettre de cachet), et tout d’une révolte contre une hausse de l’octroi, qui a poussé les parisiens à essayer de percer des trous dans les murailles de la ville pour pouvoir en éviter les portes.
    L’outil privilégié pour ce genre de travail était à l’époque le canon. Et la Bastille était le seul endroit, dans Paris, qui en était muni.
    Insurrection récupérée et devenue mythe par la suite. Ce qui n’en fait pas un épisode moins intéressant d’un point de vue rôliste ! Cette période était couverte par un livre dont vous êtes le héros de de la série Histoire, il faudra que je le relise un de ces jours.

    1. Avatar de scriiiptor

      Ah oui, magnifique souvenir de Seconde ! Et quelle réhabilitation du canon comme outil d’urbanisme radical
      Tu mets le doigt sur un truc essentiel : la prise de la Bastille, telle qu’on la fantasme aujourd’hui, c’est une relecture mythifiée. En vrai, ce n’était pas exactement une opération de libération des masses opprimées version « Braveheart ».
      – 7 prisonniers à libérer, dont 4 faussaires, 2 fous, et un noble accusé d’inceste (glamour, hein ?).
      – Une forteresse semi-désaffectée, gardée par quelques invalides un peu paumés.
      – Et une recherche de poudre et de canons pour poursuivre un soulèvement déjà en cours, en partie lié à la disette, à l’inflation, et aux tensions sur les prix de la bouffe et… de l’octroi, comme tu le soulignes parfaitement.

      Et pourtant, malgré ce petit côté « braquage logistique » plus que révolution romantique… la Bastille va devenir le symbole absolu de la lutte contre l’arbitraire, parce que ça arrange tout le monde :
      Les révolutionnaires ? Ça leur fait un bon storytelling.
      Les journalistes ? Une icône facile à imprimer.
      L’Histoire officielle ? Une belle date à mettre dans les manuels.

      Pour le rôliste :
      Tu as mille raisons d’y replonger :

      Une ambiance de tension urbaine, de chaos rampant, de luttes de pouvoir.
      Des factions multiples : gardes, milices bourgeoises, faubourgs en colère, députés qui flippent à Versailles…
      Et surtout une occasion parfaite pour des personnages-joueurs d’être au mauvais endroit, au mauvais moment… ou au centre d’un événement qu’ils ne comprendront que plus tard.

      Et merci pour le clin d’œil à la série Histoire en mode “Livre dont vous êtes le héros”, ça aussi, ça mérite une redécouverte. Si jamais tu retrouves le titre, fais tourner !

      PS : Si tu relis attentivement ce commentaire, tu verras que tu as déverrouillé un cadeau « Correspondance Secrète »… ou même deux…

  3. Avatar de Justin Busch

    J’ai souvent du mal à expliquer aux autres anglophones que nous nous trompons en appellant la fête « Bastille Day », que ce n’est pas du tout le nom officiel du jour. Mais je n’ai jamais compris pourquoi nous faisions cette erreur. Maintenant je comprends beaucoup mieux — c’était notre meilleure conjecture quand la réalité elle-même était floue !

    1. Avatar de scriiiptor

      Merci Justin, ton commentaire est à la fois très juste et très éclairant !
      Et c’est là où on va voir que j’aurais voulu moi aussi faire l’article sur le 14 juillet. Comme je me suis fais couper l’herbe sous le pied, je vais faire un long commentaire à la place 😉

      Effectivement, « Bastille Day » est une traduction qui a pris racine… parce qu’il fallait bien dire quelque chose, et qu’en face, la France elle-même n’était pas super claire sur ce qu’on fêtait exactement ce jour-là. Comme tu le dis, c’est une conjecture pratique qui est devenue un raccourci culturel.

      Quelques éléments pour aller plus loin :

      Le 14 juillet commémore deux événements historiques distincts :

      La prise de la Bastille en 1789 (symbole de la chute de l’absolutisme, mais aussi un épisode violent, sanglant, et complexe).

      La Fête de la Fédération en 1790 (beaucoup plus consensuelle, avec La Fayette, Louis XVI qui jure sur la Constitution, et un gros pique-nique géant pour célébrer l’unité nationale).

      Lorsqu’en 1880, la République cherche une date pour créer une fête nationale officielle, on choisit le 14 juillet… mais sans dire clairement lequel des deux événements est célébré. Les débats parlementaires sont volontairement ambigus : on laisse penser que c’est la Fête de la Fédération, pour rassurer les modérés et les monarchistes orléanistes encore présents au pouvoir… tout en faisant vibrer les cœurs républicains sur la prise de la Bastille.

      D’où cette ambivalence géniale (ou bordélique, selon les points de vue) :

      Pour les révolutionnaires, c’est le début de la liberté.

      Pour les républicains modérés, c’est l’unité retrouvée.

      Pour les Anglo-saxons, c’est plus simple : la Bastille, c’est un bon symbole fort, une prison prise d’assaut par le peuple. Ça colle avec le storytelling. Et en anglais, « Federation Day » sonne beaucoup trop Star Trek.

      En résumé :

      « Bastille Day », ce n’est pas faux… mais c’est réducteur. C’est une traduction approximative, devenue canon dans les médias anglophones. Et vu que les Français eux-mêmes n’ont jamais été fichus de se mettre d’accord sur le sens profond du 14 juillet, difficile de reprocher à qui que ce soit de se tromper !

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