NĂ©e Ă  Londres en 1838 sous le nom d’Eliza Hodges Thompson, Lydia Thompson grandit dans le quartier de Covent Garden, un haut-lieu de théùtres et de spectacles populaires. Elle dĂ©bute trĂšs tĂŽt comme danseuse et se fait remarquer par son Ă©nergie et son charme.

Lydia Thompson

Dans les annĂ©es 1850 et 1860, elle s’impose sur la scĂšne londonienne dans les pantomimes et les comĂ©dies burlesques, un genre dĂ©jĂ  en vogue grĂące Ă  des auteurs comme James PlanchĂ©, H. J. Byron ou F. C. Burnand. Elle y pratique un art hybride : parodie de piĂšces connues, travestissements, chansons, numĂ©ros de danse virtuoses, tout cela enveloppĂ© dans une lĂ©gĂšretĂ© parfois grivoise qui amuse et choque Ă  la fois.

En 1868, accompagnĂ©e de son mari Alexander Henderson et d’une troupe de jeunes actrices, elle part pour les États-Unis. La troupe se fait appeler les British Blondes, et le premier spectacle, Ixion, connaĂźt un triomphe immĂ©diat.

Lydia Thompson

Le public new-yorkais dĂ©couvre un genre encore inconnu : mĂ©lange de satire, d’humour, de danse et d’exhibition de jambes fĂ©minines en collants. Ce sont les dĂ©buts du burlesque amĂ©ricain.

Mais le succĂšs attire trĂšs vite une rĂ©action hostile. DĂšs 1869, la presse conservatrice dĂ©nonce les “leg shows” et fustige ces artistes dĂ©crites comme « fardĂ©es, artificielles, et indĂ©centes ». Des Ă©ditoriaux appellent Ă  bannir ces reprĂ©sentations venues d’Angleterre, accusĂ©es de pervertir la jeunesse. Lydia Thompson ne se laisse pas intimider : lorsqu’un journaliste du Chicago Times l’insulte publiquement, elle et ses collĂšgues n’hĂ©sitent pas Ă  l’affronter physiquement, ce qui provoque un Ă©norme scandale
 et renforce leur popularitĂ©.

La carriĂšre amĂ©ricaine de Thompson dure prĂšs de six ans. Elle finit par rentrer en Angleterre, oĂč elle continue Ă  produire et jouer des burlesques jusqu’aux annĂ©es 1890. Elle meurt en 1908, laissant une image contrastĂ©e : pionniĂšre, scandaleuse, mais aussi figure fondatrice d’un genre théùtral qui allait influencer le music-hall et, plus tard, le burlesque moderne du XXᔉ siĂšcle.


Encadré

Qu’est-ce que le burlesque victorien ?

Le burlesque victorien est une forme de théùtre populaire apparue Ă  Londres dans les annĂ©es 1830 et florissante jusqu’aux annĂ©es 1890. Il s’agit de parodies scĂ©niques d’opĂ©ras, de tragĂ©dies antiques ou de piĂšces de Shakespeare, transformĂ©es en spectacles comiques et musicaux.

Caractéristiques principales :

  • Parodie et satire : dialogues en vers rimĂ©s, calembours, anachronismes.
  • Musique : airs d’opĂ©ra ou chansons populaires avec de nouvelles paroles, parfois musiques originales (surtout aprĂšs 1880).
  • Travestissements : les fameux breeches roles, oĂč des actrices jouaient des rĂŽles masculins en collants, Ă©taient une attraction centrale ; Ă  l’inverse, certains rĂŽles fĂ©minins ĂągĂ©s Ă©taient jouĂ©s par des hommes.
  • Spectacle total : danse, mise en scĂšne spectaculaire, dĂ©cors et costumes parfois extravagants.
  • DurĂ©e : au dĂ©part des piĂšces courtes en complĂ©ment d’un drame ou d’un opĂ©ra, puis des spectacles plus longs, parfois en deux ou trois actes.
Victorian Burlesque
Victorian Burlesque
Victorian Burlesque

En somme, le burlesque victorien Ă©tait moins grivois qu’on ne l’imagine aujourd’hui : c’était avant tout une parodie brillante et satirique, mĂ©lange de culture « haute » et d’humour populaire, oĂč le jeu sur les identitĂ©s et les costumes ouvrait un espace de libertĂ© et de spectacle.

  • Auteurs et figures marquantes : James PlanchĂ© (pionnier), H. J. Byron, F. C. Burnand (Ixion, 1863), William Brough, W. S. Gilbert (avant ses opĂ©ras avec Sullivan).
  • Acteurs et vedettes : Lydia Thompson, Nellie Farren (cĂ©lĂšbre « principal boy » du Gaiety), Fred Leslie, Willie Edouin.
  • Théùtres emblĂ©matiques : Olympic Theatre (Madame Vestris, 1831), Strand Theatre et surtout le Gaiety Theatre, vĂ©ritable temple du burlesque de 1868 aux annĂ©es 1890.

Le genre connut son apogĂ©e dans les annĂ©es 1860-1880, avec des parodies d’opĂ©ras de Verdi, Wagner ou Bizet, et des Shakespeare « revisitĂ©s ». Il dĂ©cline ensuite, supplantĂ© par la comĂ©die musicale Ă©douardienne portĂ©e par George Edwardes et ses « Gaiety Girls ».


Le burlesque comme décor de jeu de rÎle

Le burlesque du XIXᔉ siĂšcle n’est pas qu’un divertissement populaire : c’est aussi un lieu de mĂ©tamorphose. Les actrices y endossent des rĂŽles masculins, les costumes brouillent les identitĂ©s, les artifices de scĂšne crĂ©ent une rĂ©alitĂ© alternative. Pour des jeux de rĂŽle historiques ou fantastiques, cet univers est une mine d’inspiration.


Chùteau Falkenstein (années 1870)

Dans une campagne Falkenstein, les théùtres burlesques peuvent devenir des espaces oĂč les Fae se fondent dans la sociĂ©tĂ© humaine. Qui oserait soupçonner qu’une actrice travestie en prince sur scĂšne est rĂ©ellement une crĂ©ature fĂ©erique ? Les costumes, maquillages et masques deviennent des armes de dissimulation. Les intrigues peuvent tourner autour d’une troupe en tournĂ©e, objet de fascination et de scandale, mais aussi de complots politiques ou magiques.


L’Appel de Cthulhu – Ă©poque victorienne

Les coulisses des théùtres sont pleines de secrets. DerriĂšre les rires et la musique, un grimoire peut circuler, ou une actrice peut ĂȘtre l’intermĂ©diaire d’un culte occulte. Le public croit assister Ă  une parodie inoffensive, mais le spectacle dissimule une invocation ou une machination plus sombre.


Jeux pulp ou contemporains

En transposant l’idĂ©e du burlesque Ă  une autre Ă©poque, on retrouve toujours le mĂȘme potentiel : le spectacle comme miroir dĂ©formant de la sociĂ©tĂ©. Dans un pulp des annĂ©es 1930, une troupe itinĂ©rante peut ĂȘtre le refuge d’espions ou de contrebandiers. Dans un jeu contemporain, un revival burlesque peut devenir le terrain de luttes culturelles et politiques.


Lydia Thompson

Lydia Thompson incarne Ă  elle seule l’ambiguĂŻtĂ© du burlesque : un art Ă  la fois satirique et scandaleux, qui joue avec les identitĂ©s, les costumes et les apparences. Pour le jeu de rĂŽle, c’est une invitation Ă  explorer ces zones d’ombre et de lumiĂšre, oĂč l’illusion peut devenir vĂ©ritĂ©, et oĂč chaque personnage peut ĂȘtre plus que ce qu’il paraĂźt.


inspi ciné

Golem, le tueur de Londres

(en vo The Limehouse Golem)

Réalisé par Juan Carlos Medina et adapté du roman de Peter Ackroyd (Dan Leno and the Limehouse Golem, 1994), ce film plonge dans le Londres victorien de 1880.

L’intrigue suit une enquĂȘte autour d’une sĂ©rie de meurtres sordides attribuĂ©s au mystĂ©rieux “Golem de Limehouse”. Le dĂ©tective John Kildare (Bill Nighy) explore les bas-fonds de Londres et se retrouve entraĂźnĂ© dans le monde des théùtres populaires.

Golem, le tueur de Londres
Golem, le tueur de Londres
Golem, le tueur de Londres
Golem, le tueur de Londres
Golem, le tueur de Londres

Pour le jeu de rĂŽle, The Limehouse Golem est une excellente porte d’entrĂ©e : il montre comment les scĂšnes bigarrĂ©es du burlesque victorien pouvaient se mĂȘler Ă  la noirceur d’une enquĂȘte policiĂšre, entre rires forcĂ©s, masques sociaux et menaces tapies dans l’ombre.

C’est lĂ  qu’apparaĂźt Dan Leno (jouĂ© par Douglas Booth), vĂ©ritable vedette du music-hall de l’époque, cĂ©lĂšbre pour ses pantomimes et ses numĂ©ros comiques. Le film restitue les ambiances des théùtres burlesques et music-halls : travestissements, satire sociale, coulisses sombres pleines de secrets.



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