La Huldra — qu’on appelle aussi Huldre, Huldre-folk ou Hulder selon les régions — fait partie du vieux folklore scandinave. C’est une femme des bois, d’une beauté trompeuse. De dos, on découvre souvent une queue animale, parfois de vache, parfois de renard, et un dos creux comme un tronc d’arbre. Elle vit dans les forêts, attire les voyageurs, les charme, ou les égare. Mais contrairement aux succubes des légendes chrétiennes, elle n’est pas forcément malveillante. Elle récompense les gens polis et respectueux, et punit ceux qui abîment ou méprisent la nature.

Dans les contes norvégiens, la Huldra incarne la part sauvage, libre, indomptable du monde. C’est une créature de transition, entre l’humain et le sylvestre, entre le désir et la peur. Elle rappelle aux hommes qu’ils ne contrôlent rien. Et c’est sans doute ce qui la rend aussi fascinante aujourd’hui.


Thale (le film)

Thale

En 2012, le réalisateur norvégien Aleksander L. Nordaas signe Thale, un film étrange et presque intime, tourné avec un budget minuscule dans des décors qu’il a lui-même construits. Le récit repose presque entièrement sur trois interprètes : Jon Sigve Skard, Erlend Nervold et Silje Reinåmo.

Deux nettoyeurs de scènes de crime, Leo et Elvis, découvrent dans le sous-sol d’une maison isolée une jeune femme nue et muette, maintenue en vie dans une cuve remplie de liquide médical. Peu à peu, les enregistrements laissés par le propriétaire révèlent qu’elle est une Huldra, capturée et étudiée pendant des années.

Le film ne cherche pas à faire peur ; il installe un malaise plus profond. La créature n’est pas le monstre de l’histoire ; c’est ce qu’on lui a fait. L’opposition entre la nature libre qu’elle représente et l’enfermement clinique du lieu donne au film sa tonalité à la fois poétique et dérangeante.

Thale a connu un petit succès en festival, et reste un des rares films à traiter le folklore scandinave sans le coté carte postale. Une suite, Thale 2, est annoncée depuis plusieurs années mais n’a toujours pas vu le jour.


The Huldra – Photography Book

Nordaas est revenu récemment à cette figure avec un projet très différent : un livre photo colossal, 524 pages, financé sur Kickstarter.


Le principe : 97 femmes, de tous âges et de toutes morphologies, photographiées avec une queue de Huldra. Ce n’est pas un livre “fantasy”, ni un simple nu artistique. C’est une manière de revisiter le mythe dans un contexte contemporain ; la nature, le corps, le regard, le rapport entre visible et caché.

Les images oscillent entre documentaire et mythe, comme si les Huldras existaient vraiment mais qu’on n’arrivait jamais à les saisir entièrement.


Les Huldras dans des jeux de rôle

Elles sont devenues un passage obligé dans plusieurs jeux. Mais selon le ton que tu veux donner, elles ne jouent pas du tout le même rôle.

Dans Pathfinder, la Huldra est une fée de forêt de niveau moyen (CR 4), belle et trompeuse. Elle parle le sylvestre, manipule les émotions, et frappe avec sa queue.

Dans la 5e édition de D&D, elle apparaît comme un fey chaotique neutre, capable d’influer sur la chance — littéralement bénir ou maudire quelqu’un d’un simple contact.

Chez Kobold Press, elle devient une “trollwife”, reine des bois suédois, ennemie d’Odin et de Thor, mais alliée des géants. Ils la décrivent comme une figure paysanne puissante, protectrice de la forêt, et capable d’intervenir dans des scénarios contemporains (conflits écologiques, chantiers, célébrités scandinaves poursuivies par des créatures amoureuses…).

Dans le petit jeu indépendant Huldra (AvalonaGames, 2020), on change totalement de registre. Il s’agit d’un jeu narratif sans dés ni meneur. On y joue des humains perdus, blessés, et une Huldra qui veut se rapprocher d’eux sans oser se montrer. Le jeu parle de solitude, de deuil, de besoin d’appartenance. Rien d’horrifique, rien de mécanique, juste une tension douce-amère.

Ces différentes approches montrent bien que la Huldra n’est pas un “monstre” standard. C’est un symbole : la nature sauvage, la féminité non domestiquée, ou simplement le sentiment d’être à part.


Pour la table

Elle marche très bien dans des cadres d’enquête ou de tension lente.

Dans Vaesen, c’est une apparition évidente : protectrice des forêts et des traditions oubliées.

Dans L’Appel de Cthulhu 1890, elle devient un mythe local que les chercheurs confondent avec un cas clinique.

Dans Monster of the Week, c’est une “créature de la semaine” parfaite, ni bonne ni mauvaise.

Dans un univers romantique comme Château Falkenstein, elle peut être une invitée insaisissable, dissimulant son dos sous la dentelle.

Huldra

L’important, c’est de la traiter comme une créature complexe : ni gentille, ni maléfique.

Elle agit selon ses propres règles, et tout dépend de la façon dont les humains se comportent avec elle.



Avoir encore plus de SCRiiiPT ?

Abonne-toi pour recevoir nos élucubrations directement dans ta boîte mail, fraîches (ou moisies) selon le jour.

Commentaires

Une réponse à “Les Huldras”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.