Ah, le Pulp ! Cette douce brise d’aventure légère, où l’on peut dégainer un pistolet dans une main tout en tenant un grimoire poussiéreux de l’autre, où les tentacules d’un monstre cosmique peuvent être éclatés à coups de poings américains si l’envie nous prend. Bref, le Pulp, c’est l’antidote aux journées moroses, et il faut bien l’avouer : c’est terriblement fun à jouer.
Attention, petit avertissement préalable, je surkiffe le genre pulp, même en série B, voire Z même s’il le faut. Mais j’adore aussi l’ambiance très nihiliste d’une bonne d’histoire cosmique… Le mélange des deux, je le digère mal… Je vais vous expliquer.
… Parlons-en de ce mélange des genres, notamment dans L’Appel de Cthulhu. Vous savez, ce jeu où l’on attend d’affronter la folie avec une lueur désespérée dans les yeux, où l’on préfère une bougie vacillante dans l’obscurité à une mitraillette rugissant sous le soleil du désert. Ce jeu, censé nous faire plonger dans l’horreur cosmique, finit pourtant parfois par ressembler à une production de série B, avec des archéologues casse-cou se battant avec des nazis sur fond de musique héroïque. Indiana Jones n’est jamais bien loin, chapeau vissé sur la tête.
C’est amusant, parce que, lorsque tu lances une partie de Cthulhu, tu t’attends à explorer des ruines maudites, ou à plonger dans des mystères insondables, pas à ce que la salle de jeu se transforme en un plateau de film d’action. Mais voilà, il suffit de quelques joueurs qui rêvent secrètement de fouetter des méchants tout en décryptant des hiéroglyphes, et bam ! Tu te retrouves à gérer un cocktail explosif d’action-pulp. L’atmosphère Lovecraftienne, elle, se terre quelque part, tremblante, espérant un jour reprendre sa place sous les projecteurs. Et au fond, je comprends… c’est tentant ! Qui n’a pas envie d’être un héros avec du style et des gadgets cools ?
C’est peut-être là que le bas blesse. On ne peut pas ignorer que l’Appel de Cthulhu est sorti dans les années 1980, en plein cœur de l’âge d’or d’Indiana Jones. À une époque où peu de films proposaient des aventures fantastiques dans les années 1920-1930, Indiana a eu le champ libre pour conquérir les imaginaires collectifs. Les joueurs de l’époque, face à cette absence d’alternatives solides, ont naturellement greffé ce côté pulp-aventure à leurs parties de Cthulhu.
Le problème, c’est qu’au lieu de combattre ces dérives, l’ambiance pulp a fini par se glisser insidieusement dans l’ADN du jeu. Ce qui était un clin d’œil, une liberté que s’accordaient certains joueurs et MJ, d’une façon plus ou moins officieuse, a fini jusqu’à être officialisé avec l’arrivée de Pulp Cthulhu. Bon, au moins, on a l’avantage de savoir à quoi s’attendre avec ce supplément : de l’action, des cascades, et peut-être même des tentatives de KO d’un Grand Ancien à coups de massue (ça ne marchera pas, mais c’est cool d’essayer).
Cependant, tout ce que j’espère, c’est que lorsque je lance une partie de L’Appel de Cthulhu version classique, je ne tombe pas sur une version déguisée de Pulp Cthulhu. Parce que parfois, j’ai envie de cette horreur cosmique bien oppressante, celle qui te laisse avec cette douce impression que, quoi que tu fasses, ça va mal finir. Ce côté désespéré, en somme.
Alors, oui, j’admets, je râle un peu, mais il y a des moments pour tout. Le Pulp, c’est génial, surtout quand c’est assumé. Mais quand tu te prépares pour du Cthulhu bien sombre, et que tu te retrouves avec un aventurier au fedora, une amazone ninja et un expert en arts martiaux dans ton équipe… disons que tu as un peu l’impression que Nyarlathotep n’avait pas signé pour ça non plus.
Et vous, vous êtes plutôt tentacules et bougies, ou chapeaux et revolvers ?
Commentaires
5 réponses à “Ambiance Pulp et Cthulhu ?”
Tentacules et bougies, mais comme tu dis, le fédora n’est jamais loin.
Fondamentalement, je préfère éviter les mixtures : du pulp sans supplément de tentacules pour moi, SVP
Autant je n’aime pas Cthulhu parce que ça n’a rien à voir avec les nouvelles de HPL (où des gens ordinaires souffrent de seulement apprendre l’existence des créatures du Mythe) et que la partie moyenne finit par de la baston au .45, autant j’ai follement aimé le setting « Achtung ! Cthulhu » (motorisé avec le système Savage Worlds)
On souffre mais on peux espérer faire mal aux bébêtes en face, alors que dans L’AdC, on te donne de quoi combattre sauf la chance de réussir. Et en plus, c’est même pas comme dans les livres…
En effet, avec du recul la différence entre les histoires écrites et la façon de proposer un jeu de rôle »L’Appel de Cthulhu » est assez déroutante. Et ça ne plaît pas forcément à tout le monde.
C’est vrai que Achtung!Cthulhu c’est quand même une autre façon d’aborder l’aventure face au Mythe. C’est fun avec Savage Worlds.
J’aime les deux styles ! Mais c’est vrai que l’humour n’a que très peu de place dans une « vraie » partie de Cthulhu, que je qualifierai de « nihilisme ésotérique ». Pour le côté pulp, par contre j’adore l’humour façon « Evil Dead » !
« Nihilisme ésotérique », jolie expression.