Les États-Unis n’ont jamais été envahis. Jamais. Et pourtant, le fantasme de l’invasion étrangère hante régulièrement la fiction américaine : films, romans, comics… jusqu’au jeu de rôle. Dans les années 80, en pleine Guerre froide, cette obsession prend une teinte rouge vif.
The Price of Freedom: Roleplaying in Occupied America, créé par Greg Costikyan et publié en 1986 par West End Games, en est un parfait exemple. Le jeu nous plonge dans une Amérique occupée par l’URSS, où les joueurs incarnent des résistants improvisés.

Le ton est donné dès le texte d’introduction :
« A gutless President has been elected. America has signed international agreements prohibiting “Star Wars” defenses. The Soviet Union has developed a shield against nuclear attack. The Soviet Premier demands American surrender. The President complies. Soviet troops are landing in your hometown. In this, its darkest hours, America needs heroes. Are you willing to pay… THE PRICE OF FREEDOM? »
Traduit :
« Un président sans tripe a été élu. L’Amérique a signé un traité international interdisant les défenses “Guerre des étoiles”. L’Union soviétique a développé un bouclier anti-attaques nucléaires. Le premier secrétaire soviétique exige la reddition des États-Unis. Le président plie. Les troupes soviétiques prennent pied dans votre ville. Dans ces heures sombres, l’Amérique a besoin de héros. Accepterez-vous de payer… LE PRIX DE LA LIBERTÉ ? »
Un contexte très marqué
Difficile de ne pas sourire aujourd’hui devant l’anticommunisme primaire qui transpire du jeu. Mais en 1986, l’imaginaire de l’invasion soviétique était encore pris très au sérieux, popularisé par des films comme Red Dawn (1984). The Price of Freedom s’inscrit dans cette culture de la peur, mais pousse le trait à l’extrême, au point qu’on peut aujourd’hui y voir une satire involontaire.
Greg Costikyan, pourtant auteur engagé et critique du milieu, signe ici un jeu ambigu : entre pamphlet politique, produit de son temps et… curiosité ludique presque parodique.
Comment ça se joue ?
Les joueurs incarnent des citoyens ordinaires devenus résistants : enseignants, ouvriers, commerçants… armés de courage (et de quelques fusils planqués). Le système, typique des années 80, repose sur des mécaniques assez simples, orientées vers l’action et la guérilla urbaine.
Mais au-delà des règles, c’est surtout le cadre narratif qui frappe : une Amérique transformée en terrain de guerre où chaque scénario ressemble à un épisode de série télévisée mêlant propagande et pulp militariste.
À lire, à jouer ?
Aujourd’hui, The Price of Freedom reste un OVNI. Pas sûr que beaucoup de tables veuillent s’immerger dans cette Amérique fantasmée et paranoïaque. Mais pour qui s’intéresse à l’histoire du jeu de rôle, il est fascinant comme témoignage de son époque, au même titre que certains films de série B des années Reagan.
Une relique du temps où West End Games expérimentait tout azimut, avant de frapper fort avec Star Wars: The Roleplaying Game (1987).
- Pour plus d’infos, voyez la fiche du GROG
- Et pour les curieux, certains malins trouveront encore les règles en ligne, par exemple par ici.
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