Aleister Crowley (1875–1947) est né Edward Alexander Crowley à Royal Leamington Spa, dans une famille de fondamentalistes chrétiens appartenant à la secte des Frères de Plymouth. Très jeune, il rejette cette éducation puritaine et se tourne vers l’ésotérisme, les philosophies orientales et la poésie décadente.

Étudiant à Cambridge, il découvre le symbolisme, pratique l’alpinisme de haut niveau (il tenta le K2 en 1902), et fréquente les cercles occultistes londoniens. En 1898, il entre dans la Hermetic Order of the Golden Dawn, société initiatique alors dirigée par Samuel Liddell MacGregor Mathers, où il côtoie William Butler Yeats. Des conflits internes — notamment autour de la hiérarchie et de la magie sexuelle — le poussent à fonder ses propres structures ésotériques.

En 1904, lors d’un séjour au Caire avec sa femme Rose Kelly, il affirme avoir reçu la dictée d’une entité nommée Aiwass, qui lui transmet Le Livre de la Loi (Liber AL vel Legis), texte fondateur de sa philosophie : Thelema. Sa maxime — “Fais ce que tu voudras sera le tout de la Loi” — est souvent mal comprise comme un appel au chaos, alors qu’elle exprime, dans son cadre initiatique, l’idée d’une volonté vraie (True Will), à découvrir et à suivre sans contrainte extérieure.

Crowley explore ensuite de multiples voies : tantrisme, yoga, kabbale, alchimie, magie cérémonielle. Il fonde l’A∴A∴, puis dirige une branche de l’Ordo Templi Orientis (O.T.O.), qu’il réoriente autour de la doctrine de Thelema. Ses expériences d’extase mystique et ses écrits (notamment Magick in Theory and Practice, The Vision and the Voice, ou Diary of a Drug Fiend) mêlent rigueur initiatique et provocation.


Consommateur d’opium, de cocaïne et de mescaline, bisexuel revendiqué, poète parfois brillant, Crowley choque autant qu’il fascine. La presse britannique des années 1920 le surnomme “l’homme le plus pervers du monde”, et lui prête des rituels sataniques et des crimes imaginaires. En réalité, son univers était plus philosophique que démoniaque : un syncrétisme mystique où l’expérience directe de l’absolu passait par le corps, le sexe, et la transgression des tabous moraux.
Il passe la fin de sa vie dans une relative pauvreté à Hastings, tout en continuant à écrire et à correspondre avec ses disciples. Il meurt en 1947, laissant derrière lui une œuvre abondante, souvent confuse mais d’une influence durable sur les contre-cultures du XXᵉ siècle — du rock psychédélique (Jimmy Page, David Bowie) à l’occult revival moderne.
Pour les rôlistes
Dans un cadre comme Verne & Associés 1913 ou L’Appel de Cthulhu 1890–1920, Crowley fonctionne mieux en présence distante qu’en PNJ central : un mage mondain, insupportable et fascinant, dont les disciples errent dans le monde à la recherche du “Livre de la Loi parfait”. Ses loges laissent des traces étranges, ses correspondances sont codées, et son influence flotte dans les ruelles du Caire ou les clubs londoniens.

