Eihwar fait partie de ces projets nĂ©s presque par accident. En fĂ©vrier 2023, Asrunn et Mark mettent en ligne un premier morceau, The Forge. Une prise improvisĂ©e, enregistrĂ©e dans une sorte de transe vocale, et le duo dĂ©cide dâen faire le point de dĂ©part dâun projet complet. Rien dâhistorique derriĂšre ça, rien de traditionnel au sens strict. Juste une envie de son brut, de percussions rĂ©pĂ©titives et dâun chant qui tape plus dans lâinstinct que dans la philologie.

Les deux membres, Asrunn (chant, percussions chamaniques) et Mark (machines, percussions, chant), sont français. Leur nom, Eihwar, vient de leur propre combinaison entre la rune Eihwaz et le mot war.


Pas une dĂ©claration guerriĂšre classique, mais une mĂ©taphore trĂšs claire dans leurs interviews : une âguerre intĂ©rieureâ, un appel Ă se remuer, Ă casser lâinertie. Leur imagerie ânordiqueâ nâa rien dâhistorique. Ils ne revendiquent aucun lien culturel sĂ©rieux.

Ce nâest pas du vieux norrois, ce nâest pas de la tradition, ce nâest pas un travail ethnographique. Câest un dĂ©cor, un cadre symbolique. Le âvikingâ est utilisĂ© dans son sens pop moderne, pas dans celui des historiens.
En 2024, ils passent du statut de curiositĂ© YouTube Ă un groupe signĂ© chez Season of Mist. Leur premier album, Viking War Trance, sort le 20 septembre 2024. On y retrouve leurs morceaux dĂ©jĂ connus en versions retravaillĂ©es (Ragnarök, Fenrir, Berserkr) ainsi que de nouvelles compositions (Völvaâs Chant, Geri And Freki, Baldr, Mjölnir, Sir Mannelig).
Le son repose sur un mĂ©lange trĂšs simple : percussions tribales, beats Ă©lectroniques, boucles rĂ©pĂ©titives, chants superposĂ©s. Le tout produit une transe accessible, directe, souvent trĂšs physique. Ce nâest pas subtil, mais ce nâest pas lâobjectif.
Le duo le dit lui-mĂȘme : la plupart des sons sont samplĂ©s, les instruments folk ne sont pas toujours ceux quâon imagine en les Ă©coutant, et le chant ârituelâ est souvent une improvisation en langage inventĂ©, façonnĂ©e dans lâinstant. Câest assumĂ©. Pas dâauthenticitĂ© factice, pas de discours sur les traditions perdues. Leur travail sâappuie sur un imaginaire contemporain qui recycle des symboles nordiques parce que ça parle au public, pas parce que ça reprĂ©sente une quelconque vĂ©ritĂ© historique.

Ce qui est certain, câest que la machine tourne vite. DĂšs 2024, ils se retrouvent programmĂ©s dans plusieurs festivals europĂ©ens, en particulier le Hellfest, et enchaĂźnent une tournĂ©e consĂ©quente avec seulement deux personnes sur scĂšne.

Une configuration minimaliste, qui repose entiĂšrement sur lâĂ©nergie du chant, la percussion principale et les machines. Le reste est dĂ©clenchĂ© et samplĂ©. Le public ne vient pas pour un orchestre traditionnel, mais pour une montĂ©e en tension et un dĂ©fouloir rythmique.

Pour un public rĂŽliste ou amateur de fiction, Eihwar fonctionne trĂšs bien. On ne leur demandera jamais une rigueur historique, puisquâils nâen revendiquent aucune. En revanche, leur musique tient lâambiance : rĂ©pĂ©titive, pesante, parfois un peu brute de dĂ©coffrage, mais taillĂ©e pour envelopper une scĂšne, soutenir une action, ou poser une atmosphĂšre de tension lĂ©gĂšre sans prendre toute la place.

En clair, Eihwar ne raconte pas le passĂ©. Ils crĂ©ent un dĂ©cor sonore bricolĂ©, Ă partir duquel chacun peut imaginer ce quâil veut. Et dans ce rĂŽle-lĂ , ils sont efficaces.


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