Des tranchées de 14-18 aux gratte-ciels new-yorkais

En 1986, le réalisateur John Hough (La Montagne ensorcelée, Hurlements II) tente un pari fou : ressusciter James “Biggles” Bigglesworth, héros littéraire fétiche des jeunes lecteurs britanniques depuis les années 30. Mais au lieu de rester dans la Première Guerre mondiale, Biggles: Adventures in Time mélange tout : un yuppie de Manhattan (Alex Hyde-White) est projeté dans les Flandres de 1917 pour aider Biggles (Neil Dickson) dans sa lutte contre les Allemands et une arme secrète sonore. À chaque danger, le duo devient des “jumeaux temporels” : “si vous avez un ami dans le temps, vous n’êtes jamais perdu”.

Biggles

Une curiosité 80’s, entre série B et relique

Sur le papier, il y avait de quoi relancer Biggles comme franchise internationale, sur le modèle d’Indiana Jones. La production anglo-américaine ajoute des synthés, des scènes pop new wave, et même une bande-son où l’on croise Jon Anderson (Yes), Deep Purple, Mötley Crüe et… un single produit par John Deacon de Queen. Résultat : un film schizophrène, oscillant entre hommage pulp et blockbuster clinquant.

La distribution reflète ce grand écart : Neil Dickson s’en sort avec panache en Biggles héroïque, mais Alex Hyde-White, falot, rend les passages contemporains presque gênants. En contrepoint, le film gagne une aura particulière grâce à Peter Cushing, bouleversant dans son dernier rôle, en vieux colonel Raymond, figure tutélaire qui relie passé et présent. Sa simple présence suffit à donner une gravité à ce qui aurait pu n’être qu’un nanar.

L’échec d’une saga avortée

Le film fut un échec critique et commercial, condamnant toute suite. Pourtant, Biggles avait tout pour devenir une saga : près de cent romans de W.E. Johns disponibles comme matière première, une mythologie couvrant les deux guerres mondiales, l’espionnage, l’aviation civile et la “police de l’air”.

En France, les Presses de la Cité avaient largement traduit la série, et les années 80 auraient pu redonner vie au personnage par le cinéma ou la BD. Mais l’angle choisi — le voyage temporel gadget — a brouillé le message et fait fuir le public.

Biggles en jeu de rôle : matière à réinventer

Pour nous, rôlistes, Biggles reste un réservoir d’idées :

  • Les duos impossibles : faire collaborer des PJ de différentes époques, avec tout le décalage culturel et technologique que cela suppose.
  • L’aviation pulp : zeppelins, biplans, armes secrètes… un terrain parfait pour du Savage Worlds ou du Mega.
  • Le mentor fantôme : un PNJ à la Cushing, qui guide à travers les époques, peut devenir un moteur narratif fort.
  • La saga qui n’a pas eu lieu : reprendre l’idée de base mais l’assumer à fond, en créant une campagne “Biggles pulp” qui explore ce que le cinéma n’a pas su faire.

Ce film n’est pas un chef-d’œuvre, mais il a la saveur des VHS dénichées au hasard d’un vidéoclub. Biggles appartient à cette catégorie de curiosités qui, malgré leur échec, ouvrent des portes insoupçonnées. À défaut d’avoir eu une saga ciné, il nous reste un mythe littéraire, une poignée d’images étranges… et un formidable terrain de jeu.

Utilisation JDR ?

Biggles : pilote ou voyageur du temps ?

Le Biggles originel

Expérience rôliste : réaliste ou pulp “classique”, avec des mécaniques centrées sur l’aviation, l’espionnage et l’aventure.

Identité : héros créé en 1932 par W.E. Johns, pilote de 14-18 puis de la RAF, devenu ensuite détective de l’air.

Atouts : ancré dans l’histoire, témoin romancé de l’évolution de l’aviation militaire. Idéal pour des campagnes longues et cohérentes (escadrille en 14-18, missions spéciales en 39-45, espionnage pendant la guerre froide).

Biggles
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Le Biggles voyageur temporel

Expérience rôliste : bac à sable d’anachronismes, parfait pour des mini-campagnes ou des one-shots délirants.

Identité : version 1986, liée au film Biggles: Adventures in Time. Biggles et son “twin in time” bondissent d’une époque à l’autre.

Atouts : dynamique pulp, contraste entre époques, liberté totale pour varier les cadres de jeu (tranchées, Londres 80’s, futur dystopique…).

Verdict rôliste : le voyage temporel amuse et ouvre des portes pulp, mais au prix d’une certaine perte d’identité. À vous de choisir : rester fidèle au mythe littéraire, ou embrasser le côté série B du film pour transformer Biggles en héros multiversel.



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