Julie d’Aubigny, dite La Maupin : escrime, opéra et scandale au XVIIe Siècle

Elle devient une personnalité incontournable de la vie parisienne, connue autant pour ses performances que pour son tempérament explosif. Son charisme et son audace lui valent autant d’admirateurs que d’ennemis. Sa liberté de ton, son absence de compromis et son refus de se conformer aux attentes de son époque en font une figure aussi admirée…

La Maupin

Une vie digne d’un roman de cape et d’épée

Née entre 1670 et 1673, probablement à Paris, Julie d’Aubigny, connue sous le nom de La Maupin, est une figure hors du commun. Fille de Gaston d’Aubigny, secrétaire du comte d’Armagnac, elle grandit à la cour et reçoit une éducation atypique, incluant l’escrime, un domaine réservé aux hommes. Son père, en charge de la formation des pages royaux, lui offre un entraînement rigoureux, faisant d’elle une duelliste redoutable. Très tôt, elle démontre un esprit rebelle et une assurance qui ne la quitteront jamais. Son tempérament indomptable et son habileté au combat lui forgent rapidement une réputation aussi brillante que sulfureuse.

Une jeunesse tumultueuse

Mariage et premières aventures (1687-1690)

À 14 ans, Julie devient la maîtresse du comte d’Armagnac, qui, pour éviter un scandale, la marie rapidement à Jean de Maupin. Son époux étant envoyé en province, elle s’émancipe et s’enfuit avec un certain Séranne, assistant maître d’armes en fuite après un duel illégal. Ensemble, ils parcourent la France en donnant des spectacles d’escrime, Julie s’habillant en homme sans cacher son identité. Ses talents ne passent pas inaperçus et attirent de nombreux curieux fascinés par cette jeune femme défiant les conventions.

C’est aussi à cette époque qu’elle commence à chanter dans les tavernes et les foires, attirant l’attention par sa voix puissante et sa présence charismatique. Ce talent naissant la mènera plus tard sur les plus grandes scènes parisiennes. Ses prestations sont saluées tant pour leur puissance vocale que pour leur intensité dramatique, lui assurant une place croissante dans le monde du spectacle.

L’affaire du couvent (1690-1691)

À Marseille, elle séduit une jeune femme placée de force au couvent d’Avignon par sa famille. Refusant de se soumettre aux contraintes imposées, Julie met au point un plan audacieux : elle se fait passer pour une novice et parvient à s’introduire au sein du couvent. Pour l’aider à s’échapper, elle met le feu à la cellule de cette dernière et les deux amantes prennent la fuite en profitant de la confusion générale. Cet acte lui vaut une condamnation à mort par contumace, l’accusation portant sur l’enlèvement et la profanation de lieu saint. Elle disparaît pendant plusieurs mois avant d’obtenir le pardon du roi, probablement grâce à ses soutiens influents à la cour.

Julie d'Aubigny, dite La Maupin : escrime, opéra et scandale au XVIIe Siècle

Gloire et scandales à l’Opéra

Carrière à l’Opéra et provocations (1691-1705)

Julie d'Aubigny, dite La Maupin : Escrime, Opéra et Scandale au XVIIe Siècle

Rejoignant Paris en 1691, elle débute à l’Opéra dans Cadmus et Hermione de Lully, où elle impressionne par sa voix de contralto et sa prestance. Son talent lui assure une carrière florissante pendant une quinzaine d’années, où elle interprète des rôles majeurs dans les œuvres de Campra et Destouches.

Julie d'Aubigny, dite La Maupin : escrime, opéra et scandale au XVIIe Siècle

Mais Julie ne se contente pas d’être une star de la scène : elle enchaîne provocations et duels. Un des incidents les plus célèbres se produit lors d’un bal où, vêtue en homme, elle embrasse une jeune femme en public. Trois hommes la provoquent en duel : elle les affronte et les bat tous successivement. En raison de l’interdiction des duels à Paris, elle doit fuir temporairement avant d’être graciée par Louis XIV.

Elle devient une personnalité incontournable de la vie parisienne, connue autant pour ses performances que pour son tempérament explosif. Son charisme et son audace lui valent autant d’admirateurs que d’ennemis. Sa liberté de ton, son absence de compromis et son refus de se conformer aux attentes de son époque en font une figure aussi admirée que redoutée.

Crépuscule d’une légende

Dernières années et fin tragique (1705-1707)

Après la mort de sa dernière compagne, la marquise de Florensac, en 1705, Julie quitte la scène et se retire dans un couvent en Provence. Profondément affectée, elle mène une existence recluse avant de mourir en 1707, à seulement 33 ans. Certains racontent qu’elle se serait repentie sur son lit de mort, d’autres préfèrent croire qu’elle est restée fidèle à son esprit indomptable jusqu’à la fin.


La Maupin au cinéma, en romans et en BD

Malgré son incroyable destin, Julie d’Aubigny est encore relativement méconnue du grand public. Mais quelques œuvres la mettent en avant ou s’inspirent d’elle :

Cinéma et télévision

« Mademoiselle de Maupin » (1966) : Film réalisé par Mauro Bolognini, avec Catherine Spaak et Robert Hossein.

« Julie, chevalier de Maupin » (2004) : Téléfilm réalisé par Charlotte Brandtström, avec Sarah Biasini, Pietro Sermonti et Pierre Arditi.

Romans et bandes dessinées

Théophile Gautier, « Mademoiselle de Maupin » (1835-1836) : Roman publié au départ en deux volumes publié aux éditions Renduel.

Anne-France Dautheville, « Julie, chevalier de Maupin » (1995) : Roman publié chez J.-C. Lattès.

Julie, chevalier de Maupin

En décembre 1690, Paris attend avec impatience les débuts d’une nouvelle cantatrice sur la scène de l’Opéra. Personne ne l’a encore entendue, cependant tout le monde la connaît. Mademoiselle de Maupin se bat en duel ; nul n’a réussi à la vaincre. Elle a du goût pour les hommes mais ne dédaigne pas les femmes. Sa voix de contralto se fait entendre aussi bien dans les cabarets que dans les théâtres chics. Son cœur s’enflamme pour des artistes comme pour le fils du duc de Luynes ou l’électeur de Bavière. Un jour, elle est condamnée à mort pour avoir mis le feu à un couvent et enlevé une religieuse ! Un jour encore, elle se poignarde sur scène par dépit amoureux ! Julie de Maupin a fait rêver des écrivains et inspiré des cinéastes. Sa soif de vivre, sa gourmandise, son goût du bonheur et de la liberté en fait un personnage extraordinairement vivant et vibrant. Et son histoire évoque le monde de la musique et celui de la cour de Louis XIV. Une femme qui incarne toutes les audaces du Grand Siècle.

Jean-Laurent Del Socorro, « Une pour toutes » (2022) : Roman publié à L’École des Loisirs (ISBN 9782211317566).

Julie, chevalier de Maupin

Julie Maupin court les duels et dégaine à tout va. Elle se produit également sur les plus grandes scènes d’opéra. Elle aime se travestir, collectionner les amants et séduire les jolies femmes. Par amour, elle peut se lancer dans de folles aventures, quitte à mettre sa vie en jeu. Elle combat les préjugés de son temps et conquiert sa liberté pied à pied. Cette femme hors du commun a grandi à la cour de Versailles et traversé le XVIIe siècle telle une comète. Sa vie est un roman !

[une chronique du livre à lire ici : https://limaginaerumdesymphonie.fr/2025/02/21/une-pour-toutes-jean-laurent-del-socorro/]

Dominique Monféry, « Une pour toutes » (2024) : Bande dessinée adaptée du roman de Jean-Laurent Del Socorro, publiée chez Rue de Sèvres (ISBN 9782810207015).

Julie, chevalier de Maupin

Elle se bat à l’épée, collectionne les amants et amantes, se produit en tant que chanteuse à l’opéra de Marseille… Femme hors du temps et de tout cadre, Julie d’Aubigny – dite Julie Maupin – a traversé le XVIIe siècle avec une audace et un courage dont peu de femmes ont osé faire preuve à cette époque. Elevée à la cour de Versailles, et rapidement désireuse de vivre selon ses désirs , elle mène une vie faite de rencontres, d’étonnement et d’histoires parfois rocambolesques, mais bien réelles. Jusqu’à sa mort à l’âge de 35 ans, la liberté aura été le maître mot de son intense existence.


La Maupin en jeu de rôle : une héroïne parfaite

Impossible de ne pas imaginer La Maupin dans une partie de jeu de rôle ! Son style de vie, entre cape et épée, scandale et libertinage, en fait une figure idéale pour plusieurs jeux historiques se déroulant entre 1685 et 1705 :

7e Mer / 7th Sea

Ce jeu de rôle de cape et d’épée se déroulant dans un XVIIe siècle fantasmé offre un cadre parfait pour un personnage inspiré de La Maupin. Maître escrimeuse, chanteuse et trouble-fête ? Un archétype tout trouvé !

Flashing Blades

Un jeu de rôle classique de cape et d’épée, centré sur la France du Grand Siècle, idéal pour vivre des aventures romanesques dignes de La Maupin.

Le Masque et l’Épée

Ce jeu propose des intrigues dans la haute société et le monde du théâtre, deux milieux où La Maupin aurait brillé.

Mordiou !

Un jeu de cape et d’épée qui capture l’essence des duellistes et des aventuriers du XVIIe siècle.

Et sans oublier l’incontournable Mousquetaires & Sorcellerie, qu’il suffit d’adapter à peine un peu.

Julie, chevalier de Maupin

Une figure inoubliable

Julie d’Aubigny était une femme qui refusait toute contrainte, brisant les normes de son époque avec panache. Entre duels, passions dévorantes et performances lyriques, elle mérite amplement d’être redécouverte et incarnée, que ce soit dans la fiction ou à une table de jeu de rôle. Un personnage fascinant, à jouer sans modération !



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Commentaires

3 réponses à “Julie d’Aubigny, dite La Maupin : escrime, opéra et scandale au XVIIe Siècle”

  1. Avatar de Anagrys

    Une inspiration pour Agnès de Vaudreuil de Pierre Pevel ?
    Il est bizarre qu’elle n’ait pas inspiré plus d’œuvres dérivées (films, téléfilms, séries…), à moins que sa vie ne mette la barre trop haut pour un romancier (je devrais peut-être plutôt parler de « ses vies », non…?)…?

    1. Avatar de Iso

      Possible pour l’inspiration oui. Pourquoi pas plus de films ou téléfilms ? Probablement à cause du coté très scandaleux de la Maupin, une héroïne bisexuelle, le cinéma ne sait visiblement pas bien faire. Et niveau romans, en effet c’est aussi très peu. Les anglosaxons ont tenter de faire beaucoup plus que les français, ce qui est curieux.

  2. Avatar de Symphonie

    Merci pour le tag, qui me fait découvrir ton article, j’étais passée à côté ! Le livre de Del Socorro a l’air plutôt fidèle à la réalité.
    J’avoue qu’avant de le lire, je ne la connaissais absolument pas. C’est vrai qu’il y a finalement peu d’œuvres qui semblent s’inspirer de sa vie.

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