Le principe de brÚves de fantasy ? Raconter une bonne tranche de fantasy en moins de 80 lignes .
Tandis que le crĂąne et l’omoplate de votre adversaire volent en Ă©clats, vous attendez patiemment que les volutes de poussiĂšre retombent et laissent enfin au repos les os des gardiens squelettes dĂ©charnĂ©s que vous venez de disloquer.
         Il y en a mĂȘme eu pour tous les goĂ»ts. Cinquante nuances de massacre. Au bas mot. Et si parmi les maux il faut choisir le moindre, en ce qui concerne les armes, vous avez une sage prĂ©fĂ©rence pour une solide masse dâarmes apte au concassage.
        Le nain, lui, nâa pas voulu se dĂ©partir de sa hache quitte Ă la bloquer bĂȘtement dans une carcasse vide dâos et de mailles rouillĂ©es. Ce quâil a fait. Deux fois. Ce gros sac.
          Hirvette, comme Ă son impĂ©tueuse habitude, a tout fait cramer sur son passage : boiseries pourries, dalles usĂ©es, squelettes moisis, souris zĂ©brĂ©e, main gantĂ©e du nainâŠBref. Sâil a fallu refrĂ©ner la pyromanie de la magicienne afin quâelle ne fasse pas sâeffondrer la galerie du tumulus sur vous, tout a Ă©tĂ© passĂ© mĂ©ticuleusement Ă la flamme de ses boulets de feu. A distance raisonnable des monstres, bien sĂ»râŠToujours.
       Et comme si cela ne suffisait pas, TartahâRh, le barbare aux cheveux cuivrĂ©s de votre groupe a une nouvelle fois fait usage de ses saillants muscles huilĂ©s, de ses puissantes mains de colosse pour Ă©craser deux ou trois de ces aberrations des plus faiblardes et impressionner son mondeâŠMouais, enfin quand il prend des risques inutiles, vous vous gardez bien de le lui dire. Faut avouer quâil est un tantinet soupe au lait le bestiau et a un crochet du tonnerre.
       Dans la piĂšce basse du sĂ©pulcre oĂč vous vous tenez, lâagitation disparue, un silence de mort est dĂ©sormais revenu. Ăvidemment si on omet vos respirations muettes et le clapotis insistant dâune source dâeau qui suinte des murs et goutte de ci de lĂ du plafond dĂ©foncĂ© par les racines, vous ne percevez plus aucun mouvement ou cliquetis dâarmure. MĂȘme vos compagnons, dâordinaire si braillards, se sont tus. Leur attention est entiĂšrement focalisĂ©e vers un point dâintĂ©rĂȘt de la salle. La porte. Ils lâont tous vue. Un bel ouvrage qui trĂŽne au fond de la chambre mortuaire. Moulures gĂ©omĂ©triques et dĂ©corations morbides se cĂŽtoient tandis que vous arrivez Ă dĂ©chiffrer une antique danse macabre sur lâĂ©pais chambranle de pierre de taille abimĂ©e.
       Vous avancez rapidement vers la derniĂšre demeure d’un piĂštre prĂȘtre nĂ©cromant, le but de votre visite de courtoisie. En vous dirigeant vers la crypte, vous ne remarquez aucune autre rĂ©sistance que les quelques squelettes malingres que vous venez de fracasser au sol.
     Quelques marches dĂ©crĂ©pites par les assauts du temps et glissantes du fait de lâhumiditĂ© ambiante vous emmĂšnent plusieurs mĂštres en contrebas. Cependant, la discrĂ©tion nâest pas le fort de tous les membres du groupe et vous devez ramasser le nain au pied du petit escalier, aprĂšs une chute aussi ridicule que sonore. Celui-ci vient en effet de se vautrer lamentablement en accrochant du manche de sa hache lâune de ses deux courtes jambes. PotelĂ©es. Et enferrĂ©es !
        Si le maĂźtre des lieux nâest pas encore prĂ©venu de votre arrivĂ©e, voilĂ qui est fait.
       TartahâRh, Ă©pĂ©e Ă deux mains brandie au dessus de sa tĂȘte, dĂ©cide alors de charger lourdement au travers de lâembrasure spartiate qui dĂ©limite lâentrĂ©e du caveau. Vous courez Ă sa suite de peur quâil ne commette, seul, une connerie monumentale. Mais lorsque vous arrivez derriĂšre lui, il est dĂ©jĂ en train de taper comme un sourd sur un sobre sarcophage de granit.
         « Recule, imbé⊠camarade ! », lui hurlez vous.
        Le barbare se retourne sur vous avec un regard mauvais prĂȘt Ă en dĂ©coudre, mĂȘme avec lâun des membres de sa propre coterie. Vos chausses vous paraissent humides tout Ă coup mais fort « heureusement », câest le moment prĂ©cis oĂč cette tarĂ©e dâHirvette dĂ©cide de son propre chef dâincendier le sarcophage du sycophante de la Grande Faucheuse en envoyant une pluie de boulets de feu pile dessus.
       « Eeeeh ! Non mais, câest pas vrai ?! Vous ĂȘtes complĂ©tement fĂȘlĂ©s ma parole !», glapit une voix qui aurait pu ĂȘtre la vĂŽtre tant vous approuvez ! Le nain vient de parler et fait preuve pour une fois dâune Ă©tonnante sagesse.
        « Vous allez bousiller tous ces foutus trĂ©sors, merde quoi ! » Ah ouais, le pognon, les richesses, les artefacts. Tout sâexplique. Rien Ă voir avec un subit accĂšs Ă la raison et la prudence en faitâŠ
         « KromchiezâŠÂ ! » maugrĂ©a le barbare Ă contrecĆur.
         Vous vous mettez en garde mutuellement, masse, épée, hache et bùton au clair anticipant le réveil de mauvais poil roussi du nécromancien maléfique. Et tandis que les derniÚres flammÚches se consument en noircissant de charbon le lieu du dernier repos de votre ennemi, rien ne se passe. Absolument rien.
         TartahâRh sâapproche prudemment du cĂ©notaphe ou de la tombe, vous Ă sa suite, Ă distance respectueuse. Et lorsque vous tendez le cou pour voir lâintĂ©rieur du sarcophage brisĂ©, vous entrevoyez nettement un squelette quelque peu brĂ»lĂ© habillĂ© des lambeaux dâune robe noire de cĂ©rĂ©monie. Il serre encore entre ses doigts squelettiques une piĂštre dague de cĂ©rĂ©monie antĂ©diluvienne et oxydĂ©e. Aucune lueur rouge, bleutĂ©e ou chamarrĂ©e ne vient Ă©clairer ses orbites sans vie.
    « Mouahahaha ! Il est mort ?! MORT ! Clamsé ! Claqué eulâmacchabĂ©e ! Ahahahah ! Pour un prĂȘtre nĂ©cromant, câest quand mĂȘme un peu con. Non ? », glissa malicieusement le nain Ă lâassemblĂ©e. DĂ©cidĂ©ment, quel sens de lâĂ -propos sur un ĂȘtre de lâau-delĂ . Il pourrait presque passer pour lâintellectuel du groupe. Et sâil nâĂ©tait pas si mauvais en combat, vous en auriez fait le chef. Brrrrr, non, faut pas dĂ©conner non plus.
           Sur ces entrefaites rĂ©jouissantes pour vos bourses respectives, le barbare vous demande de lâaide pour soulever les morceaux de dalle qui recouvrent encore les vestiges carbonisĂ©s et Ă©brĂ©chĂ©s du cercueil de pierre. Ce que vous faites non sans mal.
           Mais quelle nâest pas votre dĂ©sillusion lorsque en tout et pour tout trĂ©sor vous ne trouvez que des bris de fioles Ă©pars, des parchemins fatiguĂ©s et illisibles Ă la ficelle de cuir craquelĂ©, une dague et une massette bonnes Ă attraper une maladie.
           Votre Ćil sâillumine briĂšvement lorsque vous mettez la main sur une sacoche de vĂ©lin moisie dâoĂč le nain sort plusieurs kilos de piĂšces de cuivre couvertes de vert de gris. Et un livre.
     Hirvette, lâalphabĂšte du groupe, sâenquiert de dĂ©chiffrer laborieusement les runes encore lisibles avant de sâexclamer, « Un livre de nĂ©cromancie ! » : « Les Morts pour les nuls » ainsi quâun appendice « Goules et autres frivolitĂ©s ».
           « Si je me trompe, personne ne sait lire à part moi, non ? »
« Mouais, pas faux », fit le nain. Allez on sâcasse les cul-dâjattes ! On va essayer dâbrosser ces piĂšces Ă la riviĂšre. Et tant quâon y est, on en profitera pour prendre notâ bain mensuel. Pas vrai, Tartah ?»
TartahâRh acquiesça en souriant et mima le mouvement de renifler ses aisselles suspectes.
           Et vous ? Bah, câest mort de chez mort. Ăa vous apprendra Ă vider les tombeauxâŠ