Arnaud Cuidet, l’interview d’un passionné

L’actualité d’Arnaud Cuidet est brûlante et chez scriiipt nous avons sauté sur l’occasion qui nous était offerte de faire l’interview de cet auteur passionné.

Arnaud Cuidet

L’actualité d’Arnaud Cuidet est brûlante et chez scriiipt nous avons sauté sur l’occasion qui nous était offerte de faire l’interview de cet auteur passionné.

Rétrospectivement et sans vous spoiler le contenu de l’interview, nous sommes vraiment (mais vraiment) ravis de cette rencontre.

L’univers ludique et créatif (mais pas que…) d’Arnaud Cuidet s’inscrivent dans la ligne éditoriale de scriiipt. Bref, on adore ce qu’il fait, et ce qu’il dit…


L’interview d’Arnaud Cuidet

SCRiiiPT : Arnaud, pourrais-tu te présenter en quelques mots ?

Arnaud Cuidet : Bonjour, je m’appelle Arnaud et j’ai 46 ans. Je suis concepteur de jeux depuis une vingtaine d’années, et je suis également auteur de romans de SF et chaman. Je suis passionné de comics, de manga, de jeux vidéo, de films de genre et de politique, puisque je milite activement (surtout en ce moment !).

Arnaud Cuidet

J’ai commencé le JdR dans les années 80 avec D&D et AD&D. Depuis, j’ai joué à plein de jeux, notamment beaucoup de Cyberpunk, de Shadowrun, de Nephilim, d’Ambre et de Warhammer (et du L5A aussi !). Je travaille dans le milieu du JdR depuis les années 90 ; je suis passé par une boutique de jeux (Phénomène J !), Hexagonal, Multisim et Casus Belli. J’ai participé à la conception de plusieurs JdR, mais je crois que c’est la question suivante…


SCRiiiPT : Ton nom est associé au jeu de rôle depuis le début des années 2000, et surtout depuis 2009 (si je ne me trompe pas) à un jeu de rôle en particulier : Metal Adventures. Mais tu n’es pas l’homme d’un seul jeu ; qu’est-ce que tu peux nous dire sur les autres projets auxquels tu as participé et qui t’ont marqué ?

AC : Ils m’ont tous marqué. Nephilim 3e édition a été le premier JdR auquel j’ai participé, et ça a été une vraie aventure, y compris personnelle. Ensuite, RetroFutur, c’était juste n’importe quoi, dans le bon sens du terme, avec un univers déjanté et le cerveau toujours en ébullition. COPS et Arkeos ont chacun été l’occasion de belles rencontres humaines, et aussi de découvertes improbables : une bonne dizaine d’années avant d’entendre parler de chamanisme, je me documentais déjà sur les Natifs d’Amérique, sans savoir où ça mènerait bien plus tard…

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Et puis, bien sûr, il y a Faust Commando où j’ai mélangé plusieurs choses qui n’avaient à priori pas grand-chose à voir ensemble, notamment Predators et Kult. Une belle expérience un peu fofolle. Finalement, je ne me suis jamais remis de RetroFutur


SCRiiiPT : Pour revenir à Metal Adventures, quelles sont les idées, les inspirations qui sont à l’origine de ce jeu et de cet univers de jeu en particulier ?

AC : Le point de départ de Metal Adventures, c’est le soir où je suis allé voir Riddick Chronicles au cinéma. À l’époque, j’envisageais de concevoir mon premier jeu « tout seul », mais je ne savais pas du tout sur quoi partir. En voyant Vin Diesel combattre les Necromongers, j’ai su que je ferais un JdR de Space Opera, mais pas comme les autres. En effet, cette impulsion s’est immédiatement conjuguée à deux inspirations plus profondes.

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La première inspiration plus profonde, c’est une partie de Whog Shrog du début des années 2000. Whog Shrog est un (vieux) JdR des années 80 qui propose d’incarner les soldats d’élite du boucher de l’univers. Des espèces de Sardaukars, mais avec des lames tronçonneuses sur les poignets. Je n’ai fait qu’une seule partie, mais ça a été un énorme kiffe.

La deuxième inspiration plus profonde remonte à mon adolescence, et au magazine de BD Métal Hurlant (qui ressort actuellement !). Il montrait une SF complètement déjanté, qui mélangeait la science, la magie, les pouvoirs psy, et tout ce qui leur tombait sous la main. J’ai vu cette SF être qualifiée de « psychédélique », et je pense que c’est approprié. Au sein de ce chaos, j’apprécie surtout les BD de Philippe Druillet, et notamment le cycle Salammbô. Du coup, ça n’est pas un hasard si mon jeu s’appelle *Metal* Adventures. 😉

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Tout ça m’a donné l’univers du jeu et son ambiance. Il me manquait une proposition claire pour les personnages à incarner. En effet, les pirates de l’espace ne sont arrivés qu’assez tardivement dans la conception du jeu. Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est pas le fameux capitaine corsaire qui m’a inspiré, mais un OAV des années 90, Sol Bianca, qui met en scène les aventures d’un équipage de pirates de l’espace à bord du Sol Bianca, surnommé El Barco del Sol. Une fois que j’ai ouvert la porte de cet imaginaire-là, Cobra et tout l’équipage du Cowboy Beebop se sont invités aussi.

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SCRiiiPT : En 2020, à l’occasion d’un foulancement très réussi (financé à 670 % !!!), Metal Adventures fêtait son 10ème anniversaire avec une réédition « augmentée »… A cet âge, d’autres jeux ont soit disparus ou alors en sont déjà à leur 2ème ou 3ème édition… Est-ce que ça veut dire que le jeu de rôle Metal Adventures est parfait comme il est ?

AC : Oui.

(Désolé, c’était plus fort que moi.)

La perfection n’est pas de ce monde, mais je ne voyais pas l’intérêt de réinventer un moteur de jeu juste pour le plaisir de revendre du papier à des gens. Il y a certainement des choses à améliorer dans MA, mais le moteur, à priori, il tourne bien.

Un jour, peut-être, nous ferons une deuxième édition qui bouleversera le jeu, mais ça n’est (vraiment) pas pour tout de suite.


SCRiiiPT : Pour toi, à quoi devrait ressembler une aventure « idéale », une partie « idéale » de Metal Adventures ?

AC : Houlà !

Il faudrait, dans le désordre : un combat avec plein d’explosions et au moins un pirate qui se balance au lustre, un voyage spatial avec une tempête cosmique ou un trou noir, une scène de drague ou un bal, du rhum, des grenades, et un dilemme moral qui pousse les PJ à chercher au fond d’eux-mêmes ce qui fait le cœur de leur engagement pirate.

Car en réalité, ce qui est le plus important pour moi dans MA, c’est le thème de l’engagement. Devenir pirate de l’espace est une forme d’émancipation, voire d’initiation. Il s’agit de prendre sa vie en main, de décider de ce qu’on veut en faire, et d’être prêt à se battre pour ça, y compris contre plus fort que soi. En fait, il y a une dernière inspiration secrète de Metal Adventures : Lions for Lambs (le film de Robert Redford).

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SCRiiiPT : Le prochain foulancement de Metal Adventures, prévu ce jeudi 28 avril doit permettre une édition papier de la campagne « Mutant Apocalypse»… Peux-tu nous en dire quelques mots pour ceux qui vont plonger là-dedans pour la première fois ?

AC : Mutant Apocalypse est une campagne qui peut être jouée à la fois par des vétérans du jeu et par des débutants. Plusieurs options techniques et narratives permettent d’adapter la campagne dans les deux cas.

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Mutant Apocalypse c’est par ici : https://fr.ulule.com/metal-adventures-mutant-apocalypse/coming-soon/

Sans trop spoiler, Mutant Apocalypse confronte la Galaxie à une nouvelle menace : une apocalypse mutante (d’où le titre). Partout dans la Galaxie, des gens mutent sans raison et se réunissent pour former des hordes dignes des meilleurs films de zombies. C’est aux PJ de partir pour un système planétaire mystérieux afin d’y découvrir le remède de ce mal qui menace de terrasser la civilisation humaine.

Donc, au programme : des combats épiques, des expéditions, des ruines oubliées, des énigmes et de nombreuses surprises, notamment les deux aventures écrites par Fabien Fernandez et Jérôme Verschueren. Mutant Apocalypse a en effet été l’occasion de bosser avec deux guest stars que j’apprécie beaucoup !


SCRiiiPT : Et comment convaincre ceux qui ont déjà la version pdf (acquise en 2021) de miser pour avoir la version imprimée ?

AC : Et bien déjà, la version imprimée sera également une version corrigée. Je ne parle pas des fautes d’orthographe (encore que), mais de quelques erreurs qui restaient dans la version PDF de l’an dernier. Nous avons même fait appel aux détenteurs de cette version pour nous aider à produire le texte le plus nickel possible.

Ensuite, cette version imprimée sera accompagnée de nouvelles illustrations, et de toutes sortes de goodies qui seront débloqués au fil de la campagne. J’ai promis de laisser du suspense, mais comme toujours avec Open Sesame Games (qui est en fait l’équipe historique de Matagot), le matériel sera de qualité.


SCRiiiPT : Est-ce qu’il faut s’attendre à d’autres productions pour Metal Adventures dans les mois à venir ? Quel est le futur de la gamme d’après toi ?

AC : Il y a du lourd.

Voilà, je ne peux pas en dire beaucoup plus à ce stade. Sur ma page Patreon, j’ai fait le compte de tous les suppléments pour lesquels j’avais un brouillon (plus ou moins abouti), et j’arrivais à une douzaine. Et c’était juste les suppléments thématiques, je n’ai pas encore compté toutes les campagnes. Donc, il y a de quoi faire !


SCRiiiPT : Mais il n’y a pas que Metal Adventures dans la vie d’un auteur, est-ce que tu travailles sur d’autres projets en ce moment ? Il me semble bien que tu as fait une sorte de to-do-list pour 2022 sur ta page facebook. Où en es-tu ?

AC : (Je la reprends dans l’ordre, du coup)

L’année 2022 a commencé pour moi par le foulancement du dernier supplément pour Faust Commando : Armageddon, une campagne épique qui clôt la storyline de ce jeu. Là, le supplément est en production, et ça suit doucement son cours.

Concernant mon roman de dark fantasy onirique et mystique, Chevalier, je l’ai effectivement rédigé cet hiver. Ce fut l’occasion de mélanger ma démarche d’auteur et celle de chaman. Je me suis promis d’envoyer le manuscrit aux éditeurs avant l’été.

Pour mon roman de SF pornographique, ça a été un peu plus compliqué que prévu, parce que le produire en auto-édition m’a amené dans tout un tas de démarches administratives. Je devrais être paré cette semaine, et je me suis promis de le proposer sur des plateformes numériques avant l’été.

Je n’ai pas encore écrit le tome 5 des aventures de Sasha, mon cycle de SF planet-opera (mais c’est normal, c’est prévu pour cet automne).

Je piges régulièrement pour JdR Mag !

Et j’ai gardé le meilleur pour la fin : Avalon, mon prochain JdR d’action paramilitaire (ou de Tactical Espionnage Action comme dirait Snake). Je dois produire un kit de démo pour mes mécènes avant l’été (décidément !). À partir de là, j’étudie plusieurs possibilités pour le proposer au public avant la fin de l’année.

Si vous voulez vous tenir informés de tout ça :

Arnaud Cuidet
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SCRiiiPT : Merci encore pour le temps que tu nous as consacré en plein lancement du foulancement « Metal Apocalypse », je ne puis que te laisser le mot de la fin, mais en te posant une dernière question : « Comment vois-tu l’avenir du jeu de rôle, et que souhaites-tu ? »

AC : Je voudrais pouvoir répondre quelque chose d’intelligent, mais soyons honnête : je suis assez mauvais pour la prospective. Si on m’avait demandé mon avis sur l’actual play il y a quelques temps, j’aurais répondu que ça ne durerait pas. Alors…

En plus, en ce moment, le JdR a le vent dans le dos ; donc son avenir, je le vois plutôt sympa. Comment ça se concrétisera exactement, je ne sais pas trop, mais ça ne me préoccupe pas. Je me félicite de cette nouvelle jeunesse et de la bonne ambiance qui va avec.

Je crois que le fond de la question, c’est que je me suis rendu compte il y a quelques années que dans mon travail de conception, les modes, ou même les tendances, ne m’intéressaient pas beaucoup. Je me tiens informé et je joue à des jeux comme tout le monde, mais la première personne à qui mes jeux doivent plaire, c’est moi. Ça parait peut-être idiot dit comme ça, mais le jour où je l’ai formulé, ça a changé plein de choses dans ma façon de travailler.

Donc voilà ; je trace ma route. Je ne sais pas trop où elle me mène et des fois, ça me fait faire des bêtises, mais c’est ma route ; elle me convient, et c’est grâce à elle que je peux proposer des créations qui me ressemblent.


SCRiiiPT : Merci encore

AC : Merci à vous !


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